Sous-titre : « bonnes pioches », car ce sont des livres dont je ne connaissais pas encore les auteurs, et que je peux vous recommander sans hésiter.
Jennifer Haigh, Mercy street, éditions Gallmeister, janvier 2023, traduction de Janique Jouin de Laurens, 432 pages
« Des années auparavant, lorsque Claudia avait commencé à travailler au centre d’écoute, les questions la surprenaient. Pour un nombre ahurissant de personnes, les fondamentaux de la reproduction humaine étaient entourés de mystère. »
Le texte de ce très bon roman sur le thème du droit des femmes, et notamment du droit à l’avortement, alterne entre différents points de vue, et même si on devine de quel côté penche le cœur de l’autrice, les différentes opinions peuvent largement s’exprimer. Cela sert le roman, uniquement, et ne tourne jamais à la démonstration qui alourdit et ennuie. Claudia qui travaille dans une clinique pour femmes fréquente l’appartement de Timmy, son dealer d’herbe, où Anthony, militant anti-IVG passe parfois aussi…
Ma description du roman ne vaut rien, mais le livre si, il est à la fois très intéressant pour la variété des opinions sur le sujet, et pour les personnages nuancés qu’il montre.
Lu aussi par Hélène.
Élise Costa, Les nuits que l’on choisit, éditions Marchialy, février 2023, 350 pages.
« Le temps de l’instruction ne m’intéresse pas.
Je ne cours jamais après des bribes d’informations. Je veux des affaires où rien n’est ce qu’il paraît, je veux comprendre comment des gens comme lui et moi peuvent basculer. Je veux savoir de quel bois nous sommes faits. »
Cette phrase résume le très intéressant point de vue de l’autrice, chroniqueuse judiciaire qui choisit d’aborder des affaires bien différentes les unes des autres par le prisme de l’accusé, qu’il soit coupable de manière certaine, ou qu’un doute subsiste quant à sa culpabilité. Ce sont évidemment ces derniers procès qui laissent le plus de traces, ceux où l’ombre de l’erreur judiciaire plane. De journaliste, Élise Costa est devenue chroniqueuse judiciaire, et cela la passionne d’approcher au plus près le fonctionnement de la justice, de chercher la vérité cachée et d’ausculter les faits et gestes, en particulier ceux des accusés, tellement révélateurs. Je n’ai qu’un reproche à adresser à ce témoignage passionnant, qui va de cour d’assises en cour d’assise, c’est qu’il est un peu bref !
La lecture d’Eva.
Benoît Séverac, Le tableau du peintre juif, La manufacture de Livres, septembre 2022, 320 pages.
« Ces Israéliens ressemblent à tous les jeunes de leur âge sur cette planète : ils sont bruyants, ils se bousculent, ils rient en se montrant des vidéos sur leurs téléphones portables… Rien de plus normal, sauf que nous sommes au mémorial de la Shoah et qu’ils viennent de participer à des ateliers sur un génocide perpétré contre leurs aïeux. Même ici, finalement, la mémoire s’efface et devient l’Histoire. »
Lorsque la grand-tante de Stéphane, quadragénaire au chômage, lui propose de venir prendre quelques souvenirs dans l’appartement qu’elle vide, il est le premier étonné d’apprendre que sa famille possède un tableau d’un peintre juif peu connu. Ses grands-parents auraient reçu ce tableau en remerciement pour avoir hébergé le peintre et son épouse qui voulaient passer en Espagne. Mais lorsque Stéphane veut faire reconnaître ses grands-parents comme Justes, tout se complique. De Jérusalem à Madrid, il va suivre la trace du peintre pour prouver qu’il a bien survécu à la Shoah. Cela se lit comme un roman à suspense, c’est totalement une fiction, à part le tableau qui existe vraiment, mais avec des accents de vérité qui font croire à un récit autobiographique.
L’avis de Luocine.
Isabelle Sorente, La femme et l’oiseau, éditions J.-C. Lattès, septembre 2021, 370 pages.
« Il lui avait demandé s’il parlait de Tambov de temps en temps. Thomas lui avait dit qu’il ne s’était confié à personne (…), enfin à personne d’humain. Mais il en parlait au arbres et aux oiseaux, et même si c’était difficile à expliquer, ça lui faisait du bien. »
Lorsque sa fille Vina est renvoyée du lycée pour comportement violent, Élisabeth décide de prendre un peu de temps pour elle et sa fille, et de rejoindre pour quelques jours son grand-oncle Thomas qui vit près de la forêt vosgienne. Plus à l’aise seul dans la nature qu’avec son entourage, Thomas les accueille cependant gentiment et va nouer des liens avec Vina. Chacun des trois personnages se révèle petit à petit, dévoilant ce qui l’obsède. Pour Thomas, cela remonte à la guerre, où, enrôlé parmi les Malgré-nous, il fut, dans des conditions terribles, prisonnier des Russes avec son frère Alex, le grand-père d’Élisabeth. Son histoire dramatique n’éclipse pourtant pas les difficultés de Vina et de sa mère sur un autre thème que vous découvrirez… en lisant ce roman !
Il sort en poche, et a été lu aussi par T livres T arts.