« Quand on était noir au pays de la liberté, la moindre interaction avec un représentant des forces de l’ordre avait quelque chose de terrifiant. On avait l’impression de marcher en permanence le long d’un dangereux précipice. Et si en plus on avait le malheur d’avoir un casier judiciaire, c’était comme si ce précipice était bordé de peaux de banane. »
Ike Randolph et Buddy Lee Jenkins vivent tous deux en Virginie occidentale, mais pourtant dans des mondes séparés, l’un étant noir, ex-membre d’un gang, mais revenu dans le droit chemin pour sa famille, et l’autre, blanc, sorti de prison aussi, alcoolique vivotant d’expédients dans un mobil home délabré.
Ce qui aurait pu les rapprocher, ce sont leurs fils, Isiah et Derek, qui s’aiment, se marient, et ont même une petite fille. Mais aucun des deux pères n’accepte l’homosexualité de son fils, et c’est bien trop tard, lorsque les deux seront tués par balle dans une rue de Richmond, qu’ils regretteront de ne pas avoir su les écouter ou leur parler. Dès lors, l’idée de vengeance germe chez l’un, puis chez l’autre, d’autant plus que la police n’a aucune piste pour enquêter sur ce meurtre…
« On a tendance à voir la vengeance comme quelque chose de noble, de légitime, mais en vérité, c’est juste de la haine déguisée. »
La colère qui les éperonne va occasionner des scènes de brutalité un peu trop nombreuses. Ce roman n’est pas un polar, la police en est presque absente et même peu souhaitée entre les pages, il s’agit plutôt d’un roman noir où l’enquête est menée par les deux ex-taulards, ce qui n’est pas invraisemblable… On y croit vraiment.
Les deux personnages donnent du piquant au roman, notamment Buddy Lee qui ne manque pas d’un humour pas toujours partagé par son « collègue ». Par contre, l’auteur, lui, a le goût de la métaphore bien sentie, et ne manque jamais de faire des portraits bien croquignolets des personnages croisés : « Le premier golgoth était doté d’une moustache noire si épaisse qu’on aurait dit qu’un chat avait élu domicile sur sa lèvre. Quant au second, il avait un strabisme qui devait lui permettre de vérifier les priorités à droite sans tourner la tête. »
L’évolution des deux pères, d’homophobes « de base » à plus de compréhension pour les différences, n’est pas mal vue, et donne de la profondeur à ce roman où l’action, pour ne pas dire la violence, n’est jamais loin. L’ensemble n’est peut-être pas follement original pour qui a déjà lu pas mal de romans noirs américains, mais si j’ai l’air de faire la fine bouche, comme ça, je ne me suis pas ennuyée un instant, et j’ai déjà en ligne de mire les deux autres romans de l’auteur !
La colère de S.A. Cosby (Razorblade tears, 2021) éditions Sonatine, 2023, traduction de Pierre Szczeciner, 368 pages, sorti en Pocket.
Athalie en ressort un peu lassée par les scènes d’action, Dasola le conseille absolument et c’est une réussite pour Nicole.
Aurais-je raté d’autres avis ?
Pas lu, mais je me souvins bien de cette histoire;
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Le sujet est de ceux dont on se souvient… Je lirai volontiers les autres romans de l’auteur.
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J’ai déjà noté l’auteur et ce titre là en particulier. La bibliothèque ne l’a pas mais elle en a d’autres. Je crois que je ne vais pas tarder à m’y attaquer.
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L’auteur a fait un tabac aux Quais du Polar, par son physique impressionnant, tout d’abord… Dans la journée de dimanche, tous ses livres apportés par les libraires étaient vendus !
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L’un est noir et l’autre blanc, c’est ça ? Il me semble avoir lu plusieurs chroniques plutôt positives.
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C’est ça, j’avais oublié le mot « blanc » qui rend la phrase plus claire ! 😉
Ses trois romans parus en français ont des avis positifs, dans l’ensemble.
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C’est vrai que la violence m’avait parue vers la fin être dans la surenchère, mais je suis tout à fait d’accord avec toi sur le « punch » des personnages et de la langue.
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C’est plein de scènes d’action, on a l’impression que l’auteur aime à les écrire… mais je ne lui en veux pas, parce que tout de même, quels personnages !
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Il y a Le sang des innocents au catalogue de ma médiathèque mais j’ai déjà un roman de Percival Everett dans ma PAL qui doit être dans la même veine.
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Je ne saurais te dire pour Percival Everett, mais Le sang des innocents semble très bien aussi.
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Aujourd’hui je ne me laisse pas tenter par la violence…
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C’est une violence qui n’est pas gratuite, sinon, je n’aurais pas terminé le roman… elle est justifiée, si tant est que la violence puisse l’être.
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Encore un auteur que je ne connais pas. Mais cette violence que tu évoques, en ai-je envie ? Je ne sais pas !
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Comme je le réponds à Anne, elle n’est pas gratuite, ce qui peut faire pencher la balance dans le sens positif.
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je sus toujours tellement révoltée par le sort des noirs aux USA , je n’ai pas lu ce roman mais beaucoup d’autres sur ce même sujet
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L’auteur insiste sur ce sujet, notamment dans les discussions entre les deux protagonistes, et il a bien raison. Ses personnages sont assez nuancés pour être passionnants.
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J’ai Le sang des innocents dans ma PAL et je passe constamment par des phases de doute, j’avais failli choisir La colère en premier. Dasola avait préféré ce dernier, mais ton billet me laisse espérer que j’ai fait le bon choix.
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Je pense que les trois sont bons. Je voulais commencer par Les routes oubliées qui est le premier paru en France, même s’il n’y a pas de personnages récurrents, mais tout avait déjà été vendu (au deuxième jour des Quais du Polar).
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Oui, oui, tu peux continuer, en tout cas avec le suivant Le sang des innocents 🙂 Il a le chic pour camper des personnages qui ont du corps et de la chair, et si je te rejoins sur le classicisme de la trame ce sont bien les personnages et le regard incisif de l’auteur qui font la différence.
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Je vais continuer, pas de doute. Je n’étais pas sûre d’aimer ce roman, je suis souvent en décalage concernant les auteurs de polars ou romans noirs qui ont un succès certain, mais là, j’ai été prise par ce roman qui continue de faire son chemin après lecture !
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Je viens de faire ma curieuse et de voir à quoi S.A. Cosby ressemble. On n’a en effet pas envie d’aller lui chercher des noises 😄. Et quel talent pour les portraits, j’adore ce style !
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Il est impressionnant, n’est-ce pas ?
C’est ce qui me marque dans ce roman, le style incisif…
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Un auteur que j’ai découvert il y a peu. Ce livre-ci est déjà dans ma liseuse.
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Je te souhaite bonne lecture, alors !
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Sans la violence que tu soulignes, j’aurais pu me laisser tenter…
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Je suis assez sensible à ça, et là, ça passe, car cette violence n’est pas gratuite, ni choquante.
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Et bien je découvre ta chronique avec grand plaisir vu que je l’ai déjà noté et que par chance il est dans ma médiathèque, certes indisponible pour l’instant, mais cela veut dire que quand je pourrais, je le lirai. Par contre ma médiathèque ne possède que ce titre je vais donc aller voir ce qu’il a écrit d’autre.
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Trois romans sont parus pour le moment, à lire les avis, ils semblent mériter notre intérêt tous les trois… A suivre, donc.
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Bonsoir Kathel, d’abord merci pour le lien et ce roman est épatant avec des personnages bien attachant. Le premier est bien aussi et le troisième m’a peut-être moins enthousiasmée. Pour moi, tu as lu le meilleur. Bonne soirée.
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Merci de ton avis, j’aurais ainsi moins d’attentes par rapport aux deux autres…
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J’ai découvert l’auteur chez Livr’escapades qui a beaucoup aimé Les routes oubliées. Il faut que je vérifie ce que propose ma bibliothèque !
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Je compte bien lire Les routes oubliées aussi.
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J’avais aimé aussi, surtout le contraste entre cette violence et une certaine douceur dans la remise en question de ces deux pères vis à vis de leurs fils respectifs. J’avais aimé aussi le rôle des personnages féminins qui finalement subissent et endurent toute cette violence.
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Je n’avais pas trop pensé au sort des personnages féminins qui sont intéressants, bien qu’un peu en retrait.
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