Lionel Shriver, Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes

Un couple de sexagénaires se retrouve à la retraite ou proche de ce moment fatidique, bien trop souvent en tête-à-tête, dans leur grande maison. Et cela leur pèse, bien qu’ils s’entendent plutôt pas mal. Serenata, la femme, qui a été une grande sportive, du genre à faire de grandes courses solitaires, se trouve contrainte au quasi-repos en attendant, ou plutôt en faisant reculer la date d’une opération de prothèse du genou. Remington, son époux, vient d’être licencié et, brusquement inoccupé, se lance dans le jogging. N’étant pas du genre à faire les choses à moitié, il vise directement le marathon, et s’entraîne en conséquence, non sans avoir adopté la tenue fluo appropriée. Serenata attend patiemment qu’il ait couru ses quarante-deux kilomètres et que cette lubie l’abandonne, ce qui bien sûr ne se passera pas comme ça.

Le sujet peut paraître ténu, mais d’autres univers s’y mêlent, les environnements de travail des deux époux, avec une séquence de licenciement hallucinante, les relations avec le groupe d’entraînement de Remington, mené par une certaine Bambi, les rapports aussi des parents avec leurs deux enfants adultes, rebelles à leur manière, si étranges ou étrangers l’un comme l’autre aux yeux de leurs géniteurs.
Qui connaît l’autrice se doute qu’elle critique à tout va, et de manière réjouissante, que ce soient les fondus de sport, ou disons, ceux qui se découvrent une passion soudaine pour la compétition, et qui sont prêts à croire n’importe qui leur affirmant qu’ils peuvent se surpasser, que ce soient les adeptes béats d’une religion, comme la fille du couple, ou les bien-pensants du monde du travail, prêts à réévaluer de manière négative les moindres comportements de leurs collègues.
Pas aussi fort que Il faut qu’on parle de Kevin, j’ai pourtant trouvé ce roman agréable et rapide à lire, et aimé l’acuité avec laquelle Lionel Shriver examine ses contemporains !

Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes de Lionel Shriver, (The motion of the body through space, 2020), éditions Belfond, août 2021, traduction de Catherine Gibert, 384 pages.

Un roman qui partage : Athalie et Luocine se sont ennuyées, Cécile et Une Comète l’ont trouvé un peu long, Eve retient surtout l’humour, Jérôme a pris plaisir à lire cette plume incisive, Nicole trouve que l’autrice touche très juste, Sibylline l’a trouvé intéressant sans être séduite, Titine a été enchantée.

50 commentaires sur « Lionel Shriver, Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes »

    1. C’est aussi en bibli que je l’ai trouvé, je n’étais pas sûre d’adhérer à son humour. Ne connaissant que Il faut qu’on parle de Kevin, où l’humour ne m’a pas sauté aux yeux.

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  1. Je me disais, en lisant ton billet, que cette histoire me rappelait quelque chose et merci à mon blog car sans lui j’aurais totalement oublié ce titre. Je me suis ennuyée en lisant ce très très long roman tout en dialogues. Je n’ai éprouvé aucune empathie pour aucun des personnages.

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    1. J’ai lu ton billet, effectivement ce roman et toi n’étiez pas faits pour vous entendre… J’ai plutôt vu les bons côtés de chaque personnage, je devais dans une période « bisounours ».

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    1. Merci pour le lien. Les côtés très exagérés t’ont agacée, c’est vrai que certaines scènes vont trop loin… mais j’ai lu ça comme je regarde de temps à autres une comédie au cinéma, sans y chercher de littérature.

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  2. J’ai « il faut qu’on parle de Kevin » dans ma PAL depuis trop longtemps. Tant que je ne l’aurai pas lu, pas question d’en lire un autre (c’est comme ça maintenant !)

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  3. « Il faut qu’on parle de Kevin » a été un tel choc, et j’ai à l’inverse été tellement déçue par « Double faute », pour être ensuite moyennement emballée par « Big Brother », que j’ai décidé d’arrêter avec cette auteure, dont je préfère garder le seul souvenir de « Kevin ».

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    1. Je n’avais lu que Il faut qu’on parle de Kevin, en VO en 2010, j’ai pensé que je pouvais continuer avec l’autrice, même si les avis étaient moins bons sur ses romans suivants…

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          1. Ah si, moi ça m’intéresse !
            Quand je trouverai ce livre de Lionel Shriver à la médiathèque, je crois que je me laisserai tenter car les sujets que tu évoques me parlent : la retraite à deux, les relations avec les enfants adultes, le monde du travail !

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    1. Il n’est pas indispensable, c’est plutôt le genre de roman qu’on met dans sa besace à la bibliothèque pour le cas où…
      Quant à Kevin, les avis sont plutôt positifs, dans l’ensemble…

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  4. J’aime toujours beaucoup son ton, et en interview/rencontre ça dépote tout pareil 🙂 Pas encore lu son dernier mais ça ne saurait tarder. En tout cas celui-ci m’avait aussi surprise par sa fin inhabituellement tendre et mélancolique.

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    1. J’aimerais bien assister à une rencontre avec elle. C’est la parution de son dernier qui m’a donné envie de me tourner vers celui-ci, l’autre n’étant pas encore disponible…

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  5. Heu je crois qu’il n’est pas pour moi mais il est vrai que la diversité des avis rend la lecteur indispensable, c’est très fort ça !

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