
« J’approche de la capitale. Les premiers éclairages des rues dessinent des droites et des courbes sur la surface obscure de la terre. Santiago, qui a l’air plutôt chaotique dans la journée, a la délicatesse d’un dessin quand la nuit tombe. »
Tommy a douze ans, et depuis sa naissance, une enfance excessivement protégée, car une maladie de cœur lui interdit tout effort. Un jour, au détour d’une conversation « mondaine » qu’il s’amuse à enregistrer en cachette, il apprend que sa mère s’est suicidée. Tommy est un observateur infatigable de ce qui l’entoure, et en premier lieu, de sa famille. Son père Juan, chirurgien réputé et sa belle-mère Alma le protègent beaucoup, notamment de secrets de famille qui vont bientôt émerger. Mais l’essentiel ne réside pas seulement dans ces secrets, mais plutôt dans les points de vue de chacun, que ces silences rendent bientôt incompatibles.
« Quand papa ne dit rien, c’est comme si soudain quelqu’un éteignait la lumière et laissait tout le monde dans le noir, perdu dans son coin. Voilà pourquoi les silences de papa sont noirs. »
Trois points de vue sont alternés, un peu comme dans la série « The affair ». Les personnages racontent chacun à leur tour, parfois en reprenant les événements qui mènent au délitement de la famille, de manière subtilement différente. Originalité, des petits signes indiquent en début de chapitre de quel personnage il s’agit, au lieu de leur nom : des vagues, une flèche, un sablier… on comprend vite ce que chacun représente. C’est une famille où beaucoup de choses sont tues, le procédé de reprendre les événements vus par l’un ou l’autre est donc intéressant.
J’ai trouvée très jolie l’idée de Tommy de découvrir et noter dix choses sur sa mère. Le personnage du garçon est sans doute le plus immédiatement attachant, mais les autres ne manquent pas d’intérêt pour autant. Je ne dirai rien de la fin du roman, si ce n’est qu’elle est d’une certaine manière parfaite. Seul léger bémol, si j’aime bien en général que le propos d’un roman soit universel, cette fois j’aurais préféré que le Chili, et ce qui le distingue d’autres pays, soit plus perceptible.
Le reste est silence de Carla Guelfenbein, (El resto es silencio, 2008) éditions Actes Sud, 2010, traduit de l’espagnol par Claude Bleton, 312 pages en poche.
Le mois latino-américain, c’est chez Ingannmic. Livre sorti de ma PAL pour Objectif Pal.

