« La quiétude est une notion composite : elle peut être triste, redoutable, agréable, sublime, solitaire. »
Un homme passe l’été dans un camp de caravanes au bord d’une rivière glaciaire, dans un coin sauvage d’Islande. Artiste, il cherche ainsi à être au calme pour retrouver sa manière de peindre, en changer peut-être, commencer à peindre des arbres plutôt que des formes abstraites… Les autres habitations de vacances sont occupées, mais il reste dans son coin, laissant les autres à leurs occupations. Il peint, lit beaucoup, des biographies de peintres et explore la nature et les forêts environnantes. Il décide de rester pour passer l’automne sur place.
« Il fut un temps où j’avais beaucoup de rêves, comme les autres. Ils ont disparu. Peut-être les ai-je effacés avec ma peinture, enfoncés dans la toile sur le chevalet – si profondément que je ne pourrai jamais les retrouver. »
Voilà un petit roman qui à la fois sait dépayser et contenir des réflexions à portée universelle. Pour le dépaysement, j’avoue que je devais me rappeler fréquemment qu’il s’agissait de l’Islande et non du Canada, tant les arbres et les forêts ne semblent pas faire partie intégrante du paysage islandais. Ce genre d’endroit doit être rare et recherché. Le narrateur, peintre vieillissant en panne d’inspiration, fait le choix de ce lieu pour renouveler sa recherche artistique, et même s’il ne se le dit pas franchement, pour méditer sur sa vie. Ceci sans tristesse ni amertume, juste sur le mode de la constatation.
Dans un texte comme celui-ci, ce n’est pas l’histoire qui compte, même s’il se passe tout de même quelques petites choses, des rencontres, des échappées, des aléas de la vie en plein air. Pour une narration assez minimaliste, c’est l’écriture qui compte, et là, c’est tout à fait réussi, poétique et familier à la fois, avec une très belle traduction qui rend bien l’atmosphère et les méditations du narrateur.
Cette réflexion autour de la solitude est encore une jolie découverte parmi le catalogue des éditions La Peuplade, qui a publié ensuite La fenêtre au sud, du même auteur.
Au bord de la Sandá de Gyrðir Elíasson, (Sandárbokin, 2007) éditions La Peuplade, 2019, traduit de l’islandais par Catherine Eyjólfsson, 146 pages.
Repéré chez Aifelle.