Ann Patchett, Orange amère

orangeamere« L’ambiance de la fête de baptême a changé quand Albert Cousins a fait son apparition avec du gin. »
Encore un roman américain contemporain, encore une histoire de famille… je reconnais me laisser souvent tenter par ce genre de roman qu’il n’est plus trop à la mode d’appeler des sagas, et qui d’ailleurs essayent d’en renouveler les grands traits.
Ici, la particularité du roman saute aux yeux dès la page 39, lorsqu’un grand écart dans le temps est effectué. On passe de la fête de baptême de Franny à un épisode où cette même Franny prend soin de son vieux père malade. Entre temps, la mère du bébé (Franny, donc) a rencontré Albert, qui fuyait la perspective d’un dimanche après-midi avec ses jeunes enfants, et a quitté son mari pour vivre avec lui. On apprend plus loin que les six enfants des deux familles passaient tous leurs étés ensemble et qu’un drame s’est produit au cours d’un de ces étés.

« Chaque été qu’ils passèrent ensemble tous les six se déroula exactement de la même manière. Ce n’était pas tous les jours la fête, la plupart du temps, ils s’ennuyaient, mais ils firent des trucs, des vrais trucs, sans jamais se faire prendre. »
La façon dont l’auteure installe l’histoire ne manque pas d’originalité, et permet au lecteur de rassembler les fils qui semblent épars pour comprendre l’histoire de la famille. La construction s’éloigne du classique aller et retour passé/présent qu’on croise trop souvent, et c’est ce que j’ai préféré dans le roman.
Les personnages aussi sont singuliers, avec des personnalités très marquées pour la plupart, (à condition de ne pas confondre les uns et les autres, j’y reviens ensuite) et l’idée de montrer dès le deuxième chapitre le point de vue des enfants, devenus adultes, de la famille recomposée, rend le roman très prenant. Ensuite, et c’est assez malin, il est question d’un roman appelé Orange amère, qui va avoir une grande importance dans la vie des protagonistes.
J’ai beaucoup apprécié cette lecture, avec parfois, au début d’un nouveau chapitre, un peu de mal à raccrocher tous les détails déjà connus sur tel ou tel personnage, et à situer l’époque. C’est le revers de cette construction inhabituelle.
Quant au style, j’ai beaucoup aimé la façon d’insuffler de la légèreté avec des figures de style facétieuses. La société américaine, et son modèle familial, ne sortent pas forcément grandis de l’image qu’Ann Patchett en donne, mais on passe un excellent moment avec cette famille.

Orange amère de Ann Patchett (Commonwealth, 2016) éditions Actes Sud, janvier 2019, traduction de Hélène Frappat, 302 pages.

Cuné et Keisha ont aimé aussi !

39 commentaires sur « Ann Patchett, Orange amère »

  1. J’ai tellement aimé que je me suis jetée récemment sur un autre de ses romans, Anatomie de la stupeur, complètement différent, mais que je ne lâche pas. Là je navigue sur l’Amazone, vers…?

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  2. Le billet très enthousiaste de Keisha m’avait incité à le noter aussi, mais je ne l’ai pas encore lu. Si je comprends bien, une prise de notes en cours de lecture peut aider..

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  3. J’ai lu son mémoire sur son amitié toxique et j’ai beaucoup aimé du coup j’ai celui-ci dans ma PAL et ton billet me dit que j’ai bien fait

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  4. Je me suis immergée avec bonheur dans ce livre, et j’ai bien l’intention de me pencher sur d’autres titres de l’auteure… Tu as raison, elle parvient à renouveler le genre sans tomber dans la trop grande complexité (surtout côté construction) comme ont tendance à le faire certains.

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  5. Une belle surprise pour moi, je m’attendais à du vaudeville et pas du tout. Un très beau roman avec des personnages très attachants (quand on ne les confond pas ^^).

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  6. Oui, j’avais remarqué que tu avais un faible pour ce genre de romans.:) Jamais lu cette auteure encore mais tout le monde semble apprécier. Il faudra que j’y regarde de plus près !

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