« Les visiteurs furent accueillis avec méfiance. Mais ils purent établir qu’il s’agissait d’une famille de vieux croyants retirée dans la taïga dans les années trente.
Leur quotidien était d’une précarité extrême où se mêlaient les prières, la lecture des livres d’Église et une lutte véritable pour la survie dans un contexte presque primitif. »
Le journaliste Vassili Peskov est abordé un jour par des géologues qui ont découvert grâce à un vol en hélicoptère, puis rencontré, une famille de « vieux croyants » dans un endroit complètement reculé de la taïga. Ils se sont tenus éloignés de ce qu’ils nomment le « siècle », ils n’ont fréquenté personne depuis plus de trente ans, ne sont au courant ni des dernières avancées technologiques, ni de la seconde guerre mondiale. Leurs croyances les empêchent de plus de se nourrir de produits autres que ceux issus de leur potager, de la pêche ou de la cueillette. En 1982, Peskov rencontre le père, Karp Ossipovitch Lykov et sa fille Agafia. Il les revoit à intervalles irréguliers, les interroge et se lie d’amitié avec eux.
« Les hommes? Les jeunes Lykov ne les connaissaient que par les récits et le souvenir de leurs aînés. Ils appelaient » siècle » toute cette vie à laquelle ils n’avaient jamais pris part. » Ce siècle est plein de tentations, de péchés, d’outrages à Dieu. Il faut fuir et craindre les hommes «
Voilà ce qu’on leur enseignait. »
J’ai découvert ce récit passionnant dans la boîte à livres de mon village, et me suis rappelée l’avoir rencontré sur les blogs. Ce fut une lecture très enrichissante, je ne connaissais pas les « vieux croyants » et leur mode de vie très primitif m’a tout à fait fascinée. Le climat de la région de Sibérie, entre lacs Balkach et Baïkal, où ils vivent, est des plus rudes et inhospitaliers, passer de longs hivers sous la neige, et faire pousser des légumes au cœur d’une forêt un défi incroyable. D’autant qu’ils trouvent de plus le moyen de prier plusieurs heurs par jour, en plus de tout le travail physique imposé par leur survie. Quant au personnage central, Agafia, sa curiosité et sa bienveillance la rendent vraiment touchante et inoubliable. Elle vit d’ailleurs toujours dans la taïga où elle est née…
Le livre montre bien à quel point l’auteur s’est attaché aux membres de la famille qu’il a rencontrés, et le ton qu’il emploie pour son récit leur rend le plus bel hommage possible.
Ermites dans la taïga, de Vassili Peskov, éditions Actes Sud, Babel, 1992, traduction de Yves Gauthier, 300 pages.
Repéré chez Keisha et lu récemment par Sandrion. J’ai déjà en ligne de mire Des nouvelles d’Agafia qui se trouve à la médiathèque.