Polars en vrac (9)

Le début du printemps, c’est la saison des Quais du Polar, et donc le moment de lire quelques romans noirs ou policiers, genre vers lequel je reviens toujours volontiers, car le polar n’est pas tout à fait mort : clin d’œil au Bouquineur et son débat tout récent…
Commençons par des valeurs sûres. Le premier n’est pas du tout une nouveauté :

John Harvey, Les années perdues, éditions Rivages poche, 1998, traduction de Jean-Paul Gratias, 460 pages.
« Darren connaissait la prison. Ou les IJD, du moins. Les institutions pour jeunes délinquants. Des centres comme Glen Parva où, si on ne trouvait pas un moyen de se foutre en l’air pendant les premiers mois, on avait de bonnes chances d’apprendre toutes les ficelles pour accéder au grand banditisme. »

Dans ce tome de la série consacrée à Charlie Resnick, un duo de jeunes délinquants, un peu bras cassés, montent des braquages de plus en plus violents, alors que d’autres braqueurs plus organisés mettent en échec la police depuis plusieurs mois. Mais ce qui inquiète le policier, c’est la probable sortie de prison de Prior, qu’il a arrêté, plus de dix ans auparavant, et qui pourrait nourrir des idées de vengeance, notamment envers Ruth, la femme dont il pense qu’elle l’a dénoncé.
Ambiance très jazz pour ce polar situé à Nottingham, en deux époques, années 1992 et 1981… comme d’habitude, c’est à la fois bien écrit, avec un art parfait des dialogues et des portraits incisifs, et très prenant. Je ne m’en lasse pas !

Michael Connelly, Les ténèbres et la nuit, éditions Calmann-Lévy, 2022, traduction de Robert Pépin, 450 pages.
« On dit souvent que quiconque veut connaître Los Angeles doit parcourir Sunset Boulevard du centre-ville à la plage. C’est par cet itinéraire que le voyageur peut découvrir tout ce qui fait la ville : sa culture et ses gloires aussi bien que ses nombreux échecs et fissures. »

Le dernier en date des romans de Michael Connelly avec un Harry Bosch retraité mais toujours efficace pour seconder sa collègue Renée Ballard. Celle-ci occupe un poste de nuit et mène de front deux affaires : un mort par balle lors des tirs du Nouvel An, il avait la particularité, si l’on peut dire, d’avoir payé pour quitter ue organisation mafieuse. L’autre affaire est celle des « Hommes de minuit », violeurs en duo récidivistes. Leur dernière victime va peut-être pouvoir permettre de voir ce qui relie ces femmes, ou pas.
Ces deux affaires permettent aux deux policiers d’exercer leur sagacité, sur fond de crise du Covid, mais obligent Renée à aller contre les ordres de son supérieur direct.
Un bon polar, qui se dévore, mais j’avais pressenti l’une des résolutions avec un peu trop d’avance…

Carlo Lucarelli, Péché mortel, éditions Métailié, mars 2023, traduction de Serge Quadruppani, 256 pages.
« – Allez, dit-il, au point où on en est, jetons un coup d’œil. Cherchons une hache et une veste. Et une tête.
Ils ne trouvèrent rien, ni hache, ni veste, ni tête. »

Bologne, juillet 1943. Les unes du quotidien Il Resto del Carlino débutent chaque chapitre et situent bien ainsi les temps troublés et les événements qui se succèdent : débarquement en Sicile, chute de Mussolini, bombardements sur Bologne… Pourtant, le commissaire De Luca, contrairement à sa fiancée, reste assez imperméable à la politique et se concentre sur l’affaire d’un corps sans tête retrouvé dans une maison lors d’une perquisition. Sa ténacité lui permet d’avancer dans ses investigations, même contre l’avis de son supérieur, mais toujours pas de tête ! Et lorsqu’enfin, il en trouve une, elle ne correspond pas au corps.
J’avais déjà lu un roman de Carlo Lucarelli, de la série qui se passait au XIXème siècle en Erythrée, je découvre ce nouvel enquêteur avec le deuxième roman de la série, mais qui revient sur ses débuts. Le contexte historique et les personnages sont passionnants, je me suis peut-être un peu désintéressée de l’enquête à un certain moment, puisque deux semaines après avoir terminé, je ne me souviens plus de la résolution. Mais bon, c’est un polar solide et bien écrit, rien à redire.

Matt Wesolowski, Six versions Les orphelins du Mont Scarclaw, éditions Les Arènes, janvier 2023, traduction de Antoine Chainas, 315 pages.
« Bienvenue dans Six versions, je suis Scott King.
Durant six semaines, nous reviendrons sur la tragédie du Mont Scarclaw. Six manières de voir les choses, six versions différentes. »

Une toute nouvelle série venant d’Angleterre a attiré mon attention, avec les mots « nature sauvage », « cold case » et « podcast ». Vingt ans après la disparition d’un jeune de quinze ans lors d’un camp de vacances sur le Mont Scarclaw, en Ecosse, et la découverte d’un corps dans un marais un an plus tard, Scott King, réalisateur très connu du podcast « Six versions », donne la parole à six personnes qui ont connu ce drame de très près : organisateur du camp, habitants du village ou camarades de Tom Jeffries, ils racontent leurs souvenirs, se contredisent parfois, poussent l’imagination de l’auditeur vers telle ou telle piste. Les personnages ont de l’épaisseur et une légère dose de légende ajoute à la couleur locale. J’ai beaucoup aimé ce roman très original, intelligemment tourné et prenant, et je pense déjà à mettre le deuxième podcast, déjà paru, dans ma pile à lire !

Voilà pour aujourd’hui. Et vous, avez-vous fait des découvertes au rayon policier de votre librairie ?

33 commentaires sur « Polars en vrac (9) »

  1. Je n’en ai lu aucun ; si j’ai un creux je reviendrai à ton billet (on peut rêver hein !). J’ai découvert Dror Mishani ce mois-ci, tu le sais, une série que je suivrai à l’avenir. Je me rends compte que je suis plus attirée par les romans noirs maintenant, même si la frontière est mince entre les deux. (Intéressant le billet du Bouquineur).

    J’aime

  2. J’ai finalement fait une balade aux Quais du Polar, je suis repartie avec de la littérature allemande ;-). Très intéressée également par Lucarelli ( souvenir d’un précédent Quais du polar ).

    Aimé par 1 personne

  3. J’ai repéré aussi Six versions qui m’avait paru très original. J’attends un peu car je voulais le lire en VO, mais j’ai bien hâte de découvrir ça.

    J’aime

  4. J’ai lu les deux derniers Lucarelli et je partage ton avis. Quant à Connelly, j’ai dévoré ses Harry Bosch les uns après les autres il y a une une dizaine d’années. Il faudrait que je tente sa série avec Ballart.

    J’aime

    1. Je n’ai jamais vraiment abandonné Michael Connelly, je n’ai pas tout lu, et j’ai croisé de temps à autres Renée Ballard ou l’avocat Mickey Haller.

      J’aime

Et vous, qu'en pensez-vous ?