Darin Strauss, La moitié d’une vie

Rentrée littéraire 2012
L’auteur : Darin Strauss est l’auteur de trois romans à succès et est lauréat de plusieurs prix prestigieux. Ses ouvrages ont été traduits dans une quinzaine de langues et publiés dans une vingtaine de pays. Il est professeur de littérature à l’Université de New York, et vit à Brooklyn avec sa femme et ses enfants. 
204 pages
Editeur : 
Rivages (août 2012)
Traduction : 
Aline Azoulay-Pacvon
Titre original : 
Half a life

Il est, au moment même où j’écris ce billet, au Festival America, en train de débattre sur « Ecrire ça s’apprend ? »… (C’est ce qui s’appelle un billet en plein dans l’actualité !) Il s’appelle Darin Strauss, et a ressenti à trente-six ans le besoin d’écrire sur un événement dramatique survenu l’année de ses dix-huit ans. A quelques semaines de son examen final et du choix de son université, il se rend avec des amis au minigolf, lorsqu’il ne peut éviter une cycliste, jeune fille de son lycée, qui coupe inopinément les deux voies de la route. La jeune fille meurt et le jeune Darin, bien qu’aucunement mis en cause, a l’impression de cesser de vivre aussi, même s’il se rend aux obsèques, s’oblige à rendre visite aux parents de Celine, entre à l’université, vit la vie d’un jeune de son âge. Le regard des autres, ou même l’absence de ce regard, la pensée quasi continuelle de ce que Celine aurait pu et aurait dû vivre, l’obsèdent.
Darin Strauss a d’abord écrit d’autres livres puis cette autofiction, si douloureuse soit-elle, s’est imposée à lui, lorsqu’il a atteint le double de l’âge que Celine aurait à jamais. Le thème de la culpabilité, analysée de l’intérieur, la mémoire et ses rappels constants, les réminiscences inattendues venues en cours d’écriture (Darin Strauss pensait écrire cinquante pages, il en a écrit quatre fois plus), la transformation de la personnalité, la menace d’un procès, tout ceci forme la trame d’un témoignage jamais larmoyant, mais indispensable autant à l’écrivain qu’au lecteur.

Extrait : Col relevé dans le brouillard de Leicester Square, assis au coin du feu d’un pub à descendre des pintes de bière : deux des innombrables situations dans lesquelles Celine ne se trouverait jamais. Chaque fois que je me faisais cette réflexion (souvent) je sombrais dans une torpeur qui s’accordait avec le climat londonien. Celine devenait alors une fille très malchanceuse que j’avais vaguement connue au lycée. Je me souviens d’avoir déambulé, seul, dans ces rues britanniques qui vous ordonnent : LOOK RIGHT, LOOK LEFT. Pour des raisons évidentes, de cet avertissement peint en blanc sur les trottoirs, naissait tout un faisceau de significations.

Et vous, qu'en pensez-vous ?