Don Winslow, Le prix de la vengeance

« Ce n’est pas à Eva qu’on va apprendre que le monde est déglingué.
Elle connaît la vie, elle connaît ce monde.
Elle sait que, quelle que soit la manière dont on y entre, on en sort toujours brisé. »
Changeons de registre aujourd’hui avec des nouvelles, et qui plus est des nouvelles policières. Enfin, il faut nuancer, ce sont, sur 537 pages, six longues nouvelles, et plutôt du domaine du « noir » que du policier à proprement parler. Don Winslow n’est pas un inconnu pour moi, j’ai déjà lu L’hiver de Frankie Machine et La patrouille de l’aube, apprécié l’univers du sud californien, entre surf et trafic de drogue, immigration clandestine et violence urbaine, le tout avec toujours une dose d’humour bienvenu. J’ai eu aussi l’occasion de voir l’auteur (et son sourire charmant), aux Quais du Polar, et de le suivre un peu sur les réseaux sociaux, où il est un anti-trumpiste virulent.

« Oui, j’ai voté pour ce type. J’allais quand même pas voter pour une nana convaincue que le pays lui devait la Maison Blanche parce que son mari s’était fait tailler une pipe.
Une démocrate en plus. »
Le vocabulaire de ces « novellas » n’est pas édulcoré, c’est un des éléments qui permet de se mettre dans le bain immédiatement, avec le goût certain de Don Winslow pour les descriptions précises et les dialogues incisifs. Parmi ces textes, bien composés et pleins de rebondissements, le premier donne son titre au livre, il est assez violent, tout en gardant sa part d’humanité, et en mettant en scène de beaux personnages : Eva, au standard pour répondre aux appels d’urgence de la police, apprend ainsi la mort de son plus jeune fils et fait jurer à l’aîné de le venger. C’est noir, très noir !
La deuxième nouvelle « Crime 101 », qui séduit par son humour, met en scène un braqueur assez original, la troisième « Le zoo de San Diego » allie encore l’humour à la tendresse pour les personnages, avec des scènes hilarantes, dont un singe nanti arme à feu, et les truands les plus bêtes qui soient !
La quatrième, « Sunset », ne manque pas d’humour non plus. Je suis entrée avec un peu plus de difficultés dans la cinquième, « Paradise »,
qui a pour cadre Hanaley Bay, à Hawaï, et le monde du trafic de drogue, mais je l’ai fini convaincue. Enfin, je n’ai pas lâché « La dernière chevauchée », avec des personnages très émouvants, un garde-frontière et une petite Salvadorienne de six ans séparée de ses parents par une loi inique.
J’ai aimé le fait que de nombreux lieux se retrouvent d’une nouvelle à l’autre, ainsi que quelques protagonistes. C’est un recueil qui séduira en particulier les lecteurs habitués à l’univers de Don Winslow, on y voit revenir certains de ses anciens personnages qu’on croyait restés dans un roman précédent ! Ces retrouvailles avec l’auteur me font augurer le meilleur de la lecture de La griffe du chien qui se trouve dans ma pile à lire.

Le prix de la vengeance de Don Winslow (Broken, 2020), éditions Harper et Collins, traduction d’Isabelle Maillet, 537 pages.

31 commentaires sur « Don Winslow, Le prix de la vengeance »

  1. De longues nouvelles ? Je me laisserai bien tenter, à l’occasion du mois de mai par exemple. Mais comme Winslow, c’est pour moi la claque magistrale de sa trilogie qui débute avec La griffe du chien, mes rares autres incursions dans son oeuvre ont eu un goût « d’en-dessous »…

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    1. Très bonne idée, « La griffe du chien » est magistral, mais attention, c’est très touffu, et il y a une suite (il forme une trilogie, avec « Cartel » et « La frontière »). On n’est pas obligé de continuer après le premier, ceci dit, il peut très bien se suffire à lui-même, sauf qu’une fois qu’on a mis le pied dans l’univers ténébreux de l’intrigue… hors de question de s’arrêter !!

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    1. J’ai bien conscience que tout le monde ne note pas mes recommandations, et heureusement ! 😉
      Quant au design, après plusieurs essais qui ne m’emballaient pas, j’ai laissé celui-ci.

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  2. Une bonne idée, tiens que ces longues nouvelles de Winslow. J’ai souvent du mal avec ce genre, mais si les histoires sont reliées dans des lieux et des personnages, j’accroche mieux. Et on ne sait jamais Keller ( personnage principal de la trilogie) y refait peut-être une apparition ?
    Et pour cette trilogie, je n’ajoute rien à ce que Ingannmic en dit, vu que nous avons fait lecture commune pour chaque tome. Sauf que La griffe du chien, c’est quand même quelque chose !

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    1. J’ai La griffe du chien dans ma PàL, j’attends un moment où je n’aurai pas trop d’emprunt en bibliothèque pour le lire ! J’ai été épatée par ces nouvelles, je connaissais pourtant déjà l’auteur !

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