Chinelo Okparanta, Sous les branches de l’udala

souslesbranchesdeludalaRentrée littéraire 2018 (15)
« Le bruit des avions au-dessus de nous était de plus en plus fort, ont suivi des cris, des bruits de pas, d’objets, de corps qui s’écrasent. »

En 1968, en pleine guerre entre le Nigeria et le Biafra, le père de la jeune Ijeoma est victime d’un raid aérien. Restée seule, avec des ressources qui vont s’amenuisant, sa mère ne voit d’autre solution que de placer l’adolescente chez le professeur et sa femme, des amis de la famille. Là, Ijeoma fait la connaissance d’une fille de son âge, et se rend compte qu’elle est attirée par elle. Quand cette relation scandaleuse est découverte et la jeune fille renvoyée auprès de sa mère, celle-ci entreprend de longues leçons autour de la Bible pour la remettre dans le droit chemin. Car le poids de la religion est énorme. Plus tard, en pension, Ijeoma et Amina se retrouvent…

« D’accord, la femme avait été créée pour l’homme. Mais en quoi cela excluait-il le fait qu’elle ait pu aussi être créée pour une autre femme ? De même que l’homme pour un autre homme ? Les possibilités étaient infinies, et chacune d’entre elles tout à fait possible. »
Le roman retrace la parcours de la jeune fille, puis jeune femme, de 1968 à 1980. Portée par une belle écriture, l’histoire d’Ijeoma, dont elle-même est la narratrice de longues années plus tard, ne manque pas de force ni d’une grande tension, car sa vie, lorsqu’elle fréquente d’autres jeunes femmes, est constamment menacée. Tout doit rester parfaitement secret, les lapidations sont monnaie courante et considérées comme « normales » pour punir ces « abominations ». L’auteure tente de donner les clefs pour comprendre la psychologie des personnages, et y réussit fort bien avec Ijeoma et avec les jeunes gens, des deux sexes, de sa génération, peut-être un peu moins avec les personnes plus âgées, quoique le portrait de la mère d’Ijeoma aille en s’affinant au fil des pages.
Si l’évolution des mentalités est lente, très lente, elle commence justement par l’amour maternel ou l’amour filial, qui sont les premiers à faire preuve d’une certaine compréhension. Publié en 2015, il est précisé en note du roman que la loi, au Nigéria, punit d’emprisonnement les relations entre personnes du même sexe, et que la lapidation est toujours prévue dans les états du Nord.
Plus que nécessaire, un très beau roman, très prenant, qui rappelle que ce qui peut sembler acquis dans les pays occidentaux, et encore, si peu, reste totalement occulté, car hors-la-loi, dans d’autres contrées.

Chinelo Okparanta est née à Port-Harcourt, au Nigéria, et vit aux États-Unis depuis l’âge de dix ans. Sous les branches de l’udala est son premier roman.
La littérature de ce pays est décidément riche avec également Chimamanda Ngozie Adichie (L’autre moitié du soleil, Americanah), Chigozie Obioma (Les pêcheurs), A. Igoni Barrett (Love is power ou quelque chose comme ça), Abubakar Adam Ibrahim (La saison des fleurs de flammes) ou Chibundu Onuzo (La fille du roi araignée)…

Sous les branches de l’udala (Under the udala trees, 2015) de Chinelo Okparanta, éditions Belfond (août 2018), traduit de l’anglais par Carine Chichereau, 371 pages.

Cathulu a trouvé le roman trop didactique, c’est un récit majeur pour Jostein, un coup de cœur pour Stephie.
Un grand merci à Lecteurs.com
Lecture pour le Nigeria (Lire le monde).
Lire-le-monde

20 commentaires sur « Chinelo Okparanta, Sous les branches de l’udala »

  1. Je ne sais pas… Je ne perçois pas assez d’enthousiasme autour de ce roman pour m’y lancer dans l’urgence mais le sujet vaut sûrement le détour, oui.

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