Esi Edugyan, Washington Black

« Je connaissais la nature du mal : le mal était blanc comme un spectre, il descendait d’une voiture un matin dans la chaleur d’une plantation terrifiée, avec des yeux vides. »
1830. Le petit Washington Black, onze ans, né esclave dans une plantation à La Barbade, pressent que le pire est à venir pour lui et les autres esclaves lorsque son maître meurt et que l’exploitation est reprise par son neveu, un homme cruel et terrifiant. Mais Washington est remarqué par le frère du nouveau maître, Christopher Wild, un scientifique plutôt original, qui rêve de construire et faire voler un dirigeable. Il se rend compte du talent de Wash pour le dessin et l’embauche pour devenir une sorte d’assistant. Mais le planteur voit d’un mauvais œil le fait d’avoir des bras en moins pour cueillir le coton, et de laisser un peu de lest à son frère détesté. La mort d’un homme va précipiter l’envol et la fuite de Washington et de son protecteur.

« J’étais un enfant noir et rien d’autre – je n’avais aucun avenir devant moi et dans mon passé, il y avait peu de clémence. Je n’étais rien, et je mourrais n’étant rien, hâtivement traqué et massacré. »
Washington suit tout d’abord celui qui l’a arraché à La Barbade, mais lorsqu’ils se trouvent séparés, apprend difficilement à devenir un homme libre. D’autant qu’il est traqué par un chasseur de primes. Il n’aura de cesse ensuite, à travers le monde, de retrouver Christopher. Ce roman d’apprentissage est composé de quatre parties, sur six ou sept ans, qui voient Washington devenir adulte. Passée la première partie, terrible, où le lecteur est plongé dans le quotidien d’une plantation gérée par un homme sans humanité, la suite permet de suivre l’homme et le petit garçon d’abord dans une odyssée en ballon, puis sur les mers. Ils partent ensuite vers le grand Nord canadien, pour des aventures qui, si elles ne sont pas de tout repos, se poursuivent dans un univers moins cruel. J’ai trouvé que la suite, surtout à partir du moment où Wash se retrouve seul, enchaînait un peu les rencontres diverses jusqu’à l’épilogue. Certes, le roman se concentre sur le jeune garçon et devient roman d’apprentissage plus que d’aventures, mais j’aurais souhaité sans doute que l’autrice aille plus loin dans le romanesque. L’impression donnée était celle d’une sorte d’éparpillement sans thème directeur : l’esclavage bien sûr, l’absence de famille et la recherche de figures de substitution sont toujours présents, mais ne m’ont pas tout à fait suffi. Quant aux découvertes scientifiques, elles restent essentiellement en toile de fond, alors que je pensais que les débuts de la navigation au moyen d’aérostats seraient plus approfondis.
Au final, ce roman assez copieux se dévore aisément et rapidement, même s’il ne m’a pas complètement conquise.

Washington Black d’Esi Edugyan, Liana Lévi, 2019, Folio, 2020, traduction de Michelle Herpe-Voslinsky, 471 pages.

L’auteure est canadienne anglophone, mais je participe tout de même avec ce roman à Québec en novembre (dans la catégorie Balade à Toronto : livre d’un auteur canadien, mais pas québecois). Livre sorti de ma pile à lire, qui participe donc à l’Objectif PAL (chez Antigone).

 

31 commentaires sur « Esi Edugyan, Washington Black »

    1. Bien vu, c’était à l’attention des lecteurs observateurs ! 🙂
      Et je reconnais que je ne donne pas forcément envie, mais tu peux essayer si tu le croises en bibli…

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  1. Il est dans ma pile à lire (gagné dans le cadre du mois américain).
    Le sujet de l’esclavage est éprouvant pour le lecteur mais on ne peut pas faire l’impasse sur ce thème (en tout cas pas moi). Tu me rassures toutefois quand tu dis que tout le livre n’est pas éprouvant.

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    1. Tout à fait d’accord, on ne peut pas faire l’impasse, mais l’auteure souligne plus la difficile sortie de l’esclavage. (avec des côtés qui rappellent Underground railroad)

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    1. J’ai eu l’impression que l’auteure voulait mettre trop de thèmes dans son roman, et du coup on ne sait plus trop où va l’histoire… Enfin, d’autres ont beaucoup aimé.

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  2. Comme il n’est pas déjà dans ma PAL, et que tu es mitigée, je passe. Pourtant le début de ton billet m’avait accrochée avec cette histoire d’aérostat, qui tranche sur la noirceur du contexte.

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  3. J’ai beaucouip amé, je crois même en avoir fait l’un de mes coups de coeur de cette année. Le thème général mais aussi le roman d’aventures, enfin, tout m’a plu

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