Celeste Ng, Tout ce qu’on ne s’est jamais dit

toutcequonnesestjamaisditCeleste Ng (prononcer Ing) déclare avoir ressenti le besoin d’écrire à propos de ce qui la terrifie le plus, perdre un être aimé. Cet effroi est compréhensible, surtout lorsqu’il s’agit comme dans ce roman d’une toute jeune fille de seize ans, qui disparaît subrepticement de la maison familiale un soir, pour être retrouvée noyée au terme de plusieurs jours d’immense angoisse pour ses parents.

Avant et après la macabre découverte, ses parents, son frère et sa sœur ont tout le temps de retourner en tout sens les derniers temps passés avec elle, pour essayer encore et toujours de comprendre… quant au lecteur, qu’il ne s’attende pas à un roman policier, surtout ! Même si la compréhension n’arrive qu’à la fin du roman, l’essentiel est ailleurs, dans l’histoire familiale, dans les malaises non exprimés, dans les échecs, les moments mal vécus, et les trop grands espoirs que ses parents ont projetés dans Lydia. Son père la rêve entourée de nombreux amis, populaire et bien insérée, contrairement à lui que sa couleur de peau a toujours mis de côté. Sa mère projette en Lydia ses rêves avortés de devenir une scientifique respectée dans un milieu essentiellement masculin. Tout cela a-t-il été trop lourd à porter pour la jeune fille, ou bien, sous son apparence de jeune fille studieuse, avait-elle des secrets bien gardés ?
Ce premier roman est remarquable, terriblement ensorcelant, et analyse avec une acuité singulière tout ce qui compose les rapports familiaux, les transmissions ratées ou réussies, les petits mensonges qui se mettent à prendre une place énorme, les petites jalousies qui rongent, les personnalités qu’on se compose pour contenter ses parents… L’auteure a fait le choix de situer son roman en 1976, et cela contribue à sa réussite, de faire évoluer ses personnages dans un monde sans téléphones portables, ni réseaux sociaux, pour se concentrer sur des rapports humains qui n’en sont pas forcément plus directs pour autant. A noter que la fin, qui aurait pu être le point faible pour un premier roman, est de mon point de vue, très réussie, ce qui ne gâche rien.

Citations : Quand ils s’étaient mariés, Marilyn et lui avaient accepté d’oublier le passé. Ils commenceraient une nouvelle vie ensemble, tous les deux, sans regarder en arrière.

Marilyn ne serait pas comme sa mère, à pousser sa fille vers un foyer et un mari, vers une vie bien rangée entre quatre murs. Elle aiderait Lydia à faire tout ce dont elle serait capable. Elle consacrerait le restant de ses jours à la guider, à la protéger, comme on s’occupait d’un rosier de concours : l’aidant à grandir, le soutenant avec des tuteurs, courbant chaque tige pour qu’il soit parfait.

L’auteure : Celeste Ng est née en Pennsylvanie, et elle a étudié à Harvard. Elle a écrit de nombreuses nouvelles publiées avant son premier roman, Tout ce qu’on ne s’est jamais dit. Elle vit dans le Massachusetts.
288
pages.
Éditeur : Sonatine (mars 2016)
Traduction : Fabrice Pointeau
Titre original : Everything I never told you

Noté chez Melo et lu grâce à NetGalley.

47 commentaires sur « Celeste Ng, Tout ce qu’on ne s’est jamais dit »

  1. Je n’arrête pas de le voir passer sur la blogosphère ce livre, il faudra que je m’y intéresse.
    Merci pour la prononciation du nom de l’auteur, parce que ça me turlupinait X)

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  2. Bon, au vu des comm’ précédents, a priori je ne suis pas le bon fil d’actu de la blogo parce que c’est le premier avis blogosphérique que je vois sur ce livre.:-) Je l’avais en revanche noté lors d’une courte chronique sur Le grand journal sur Canal, l’animateur était très enthousiaste. Tu confirmes que c’est à lire. Bien bien bien, je vais voir comment le caser dans ma PAL.

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    1. Le thème est dit dans les premières lignes, on sait qu’on ne pourra pas y couper. J’ai trouvé que ça faisait plutôt du bien de s’y confronter…

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  3. Effectivement, beaucoup d’avis positifs en ce moment. Du coup, j’ai bien envie de tenter le coup, surtout que je trouve intéressant que Sonatine se diversifie un peu 😉

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