Hugo Horiot, L’empereur, c’est moi

empereurcestmoiL’auteur : Hugo Horiot est né en 1982 à Dijon. Comédien, réalisateur et scénariste, il vit actuellement à Nantes. Il est le fils de la romancière Françoise Lefèvre, qui, alors que son fils avait été orienté dès l’âge de 18 mois en psychiatrie, a choisi de s’en occuper elle-même, et de le scolariser. Elle a écrit à ce sujet deux témoignages, Le Petit Prince cannibale, prix Goncourt des lycéens, et Surtout ne me dessine pas un mouton.
167 pages
Éditeur :
Le livre de poche (février 2015)

Ce témoignage est celui de Julien Horiot, qui s’est rebaptisé lui-même à l’âge de six ans Hugo, pour éloigner celui qui était en lui, pour devenir lui-même. Il décrit avec des mots qu’on imagine proche de ceux qui étaient dans sa tête lorsqu’il était enfant, son parcours, quatre ans, six ans, l’école, le collège. Jamais il ne mentionne qu’il était une personne avec autisme, ce que la quatrième de couverture fait pourtant en long et en large. Il pourrait être juste un enfant un peu différent, s’il ne refusait de parler, alors qu’il sait lire, s’il ne passait pas son temps à faire tourner des petites roues, si ses crises de colère ne prenaient pas des proportions extraordinaires.
Ce texte court, sobre, bien écrit, est plein de sincérité et ne cherche aucunement à susciter l’émotion à tout prix, ou à régler des comptes avec qui que ce soit. Hugo doit énormément à sa mère qui l’a tenu éloigné des institutions psychiatriques et a toujours insisté pour qu’il suive un cursus scolaire normal, même si c’était difficile pour son fils. J’entends par difficile, non pas le contenu des cours, mais les interactions avec ses camarades de classe. Grâce à sa mère, et par la suite grâce au théâtre, il a pu se mettre à parler et devenir indétectable aux yeux des autres… mais laissons plutôt le jeune homme parler de cette enfance particulière.

« Je ne suis pas un enfant, même si je leur ressemble. C’est vrai, je suis aussi moche et petit qu’eux. Dans le bureau, il y a des jouets. Ils sont nuls. Ce sont des jouets pour les enfants nuls. »

« Ma mission, c’est de retourner dans le ventre de maman. C’est la règle que je me suis fixée et je la suivrai jusqu’au bout. Jusqu’à la victoire. Jusqu’à la réussite.
Il ne faut évidemment pas parler. Si je parle, je peux donner des indices. Si je parle, je peux me trahir. »

« Madame, il y a un problème : votre fils. Votre fils parle un langage soutenu. Ce serait bien qu’il cesse et se mette au niveau de ses petits camarades. » […] J’entre dans une colère noire. Moi qui ai travaillé si dur pour parler au monde, voilà que maintenant ils veulent me confisquer ma langue puisqu’elle ne sied pas à leur médiocrité. »

plldp

Le billet de Cathulu.

Prix des lecteurs du Livre de Poche de mai.

28 commentaires sur « Hugo Horiot, L’empereur, c’est moi »

  1. Je dois lire les deux livres, forcément! J’ai vu le fils à la télé, pour présenter son livre, depuis j’ai envie, tu confirmes!

    J’aime

  2. Les extraits sont vraiment très très beaux. je le note. C’est dommage que se soit signalé sur la 4ème qu’il s’agit d’une enfant autiste, parce que je pense que le sujet c’est plus la différence en général qu’une pathologie en particulier. Je suis toujours très émue par ces enfants qui peinent à trouver leur place dans le monde (et qui veulent retourner dans le ventre de maman).

    J’aime

    1. C’est ce que j’ai aimé, que le sujet soit les enfants différents. J’en ai côtoyés pas mal dans mon école, et même s’ils n’étaient « pas vraiment  » autistes, certains comportements s’en rapprochaient.

      J’aime

      1. Françoise Lefèvre traitait vraiment le sujet selon un ressenti très personnel. Ce n’était pas tant le récit d’un vécu que l’expression des sentiments d’une mère. C’était très… viscéral. Il s’en dégageait des sentiments profonds d’amour et de colère, d’espoir et d’épuisement. Le titre à lui seul résume parfaitement ses sentiments : petit prince, pour l’enfant aimé, unique et exceptionnel, et cannibale parce qu’il la dévorait émotionnellement, la vidait de toute énergie, de toute émotion.
        Du coup je ne pense pas que les deux soient redondants, mais plutôt qu’ils se font écho.

        J’aime

  3.  » Le petit prince cannibale  » m’attend depuis une éternité, je crains un peu la charge émotionnelle du récit. Et ce livre que tu présentes deviendra incontournable ensuite. Les extraits me donnent le frisson.

    J’aime

    1. Je craignais aussi un peu. L’écriture m’a vraiment séduite, elle permet de se mettre un moment dans la tête de ce petit garçon, de ressentir sa colère (une partie de sa colère)… mais sans trop prendre aux tripes, sans trop en faire.

      J’aime

    1. Je pense qu’elle a du y mettre beaucoup de volonté, Hugo relate quelques changements d’école… Le fait qu’il « suivait » scolairement l’a aidé aussi.

      J’aime

Répondre à kathel2 Annuler la réponse.