Lydia Tchoukovskaïa, Sophia Petrovna

sophiapetrovnaL’auteur : Lydia Tchoukovskaïa est née en 1907 à Saint-Pétersbourg, son père est l’écrivain et critique Korneï Tchoukovski. Elle est écrivain, critique spécialisée dans la littérature pour enfants. En 1938 son mari est arrêté et fusillé immédiatement. Tenue dans l’ignorance de sa mort, Lydia échappe à l’arrestation en quittant Leningrad. En 1939 elle écrit Sophia Petrovna. Ce texte secret, écrit au péril de sa vie, restera un document unique sur l’année 1937. Sophia Petrovna et son roman La Plongée tiré de ses souvenirs de guerre n’ont été édités en Russie qu’à la fin des années 80. On lui doit également Entretiens avec Anna Akhmatova (1980). Elle meurt en 1996 à Moscou.
133 pages
Sous-titre : La maison déserte
Editions Interférences (2007)
Traduction : Sophie Benech

A la fin des années 30, Sophia Petrovna, devenue veuve, doit trouver un travail. Elle est engagée comme dactylographe dans une maison d’édition et apprécie beaucoup ses nouvelles fonctions, ne ménage pas sa peine en tant que citoyenne qui se veut exemplaire. Elle élève seule son fils Kolia qui part faire des études dans une ville éloignée. Pendant ce temps, Sophia se lie d’amitié avec une de ses collègues de bureau, et accède au poste de chef des dactylos. Mais des arrestations se succèdent. Sophia Petrovna accepte avec quelque étonnement les accusations de traîtrise prononcées contre ses collègues emprisonnés, jusqu’au jour où c’est son fils qui est arrêté.
On peut grosso modo séparer le livre en deux parties, avant l’arrestation de Kolia et après. Sophia n’avait rien vu venir, reste persuadée qu’il s’agit d’une erreur, et que son fils va recouvrer la liberté très rapidement. Elle ne comprend pas comment fonctionne la bureaucratie, les files d’attente, elle se heurte à des murs sans cesse… La dénonciation est claire, et il est bien évident que la diffusion de ce texte était impossible lors de la période stalinienne. Heureusement, il a été conservé et publié plus tard, car ce témoignage très fort mais romancé, qui colle aux petits faits quotidiens, montre plus que de longs discours et malgré sa sobriété, provoque l’émotion.
Je ne connaissais pas ce livre et l’ai trouvé tout à fait par hasard, au mois d’août, lors du grand « Lâcher de livres » qui a eu lieu à Lyon, dans les parcs, les gares, les hôpitaux, les paniers des « Vélo’vs » ! Butin : trois livres, j’ai été raisonnable, et je relâcherai celui-ci dès ce billet paru ! Je ne saurais trop dire pourquoi il m’a attiré, sans doute son interdiction durant de longues années en URSS, en tout cas, il ne m’a pas déçue.

Extrait : Dans sa jeunesse, lorsqu’il lui arrivait de s’ennuyer, les jours où Fiodor Ivanovitch s’absentait longtemps pour ses visites, elle s’imaginait qu’elle avait un atelier de couture à elle. Dans une grande pièce claire, de charmantes jeunes filles se penchaient sur des cascades de soie, elle leur montrait des modèles et, pendant les essayages, distrayait les dames élégantes en leur faisant la conversation. Eh bien, un bureau de dactylographie, c’était même encore mieux, cela avait quelque chose de plus sérieux. A présent, il lui arrivait souvent d’être la première à lire, à l’état de manuscrit, une nouvelle œuvre de la littérature soviétique, un récit ou un roman, et même si elle trouvait les récits et les romans soviétiques ennuyeux car il y était beaucoup question de batailles, de tracteurs, d’ateliers d’usine, et très peu d’amour, elle était quand même flattée.

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