Toshiyuki Horie, Le marais des neiges

maraisdesneigesL’auteur : Toshiyuki Horie est né en 1964. En plus de ses activités de professeur de littérature française à l’Université Meiji de Tokyo, il se consacre à la traduction (notamment de Hervé Guibert, Michel Foucault ou Valéry Larbaud) et à l’écriture. Il a reçu d’importantes distinctions littéraires au Japon, notamment le Prix Tanizaki pour le présent recueil. Il est souvent considéré dans son pays comme le successeur de Mishima. De lui, les Éditions Gallimard ont déjà publié Le pavé de l’ours, très remarqué par la critique.
208 pages
Editeur : Gallimard (2012)
Traduction : Anne Bayard-Sakai
Titre original : Yukinuma to sono shûhen

Ce ne sera pas encore une nouveauté de la rentrée littéraire aujourd’hui, mais un recueil de nouvelles à l’atmosphère paisible, une plongée dans le Japon rural d’aujourd’hui. Sur le thème du temps qui passe l’auteur excelle à retenir les petits moments magiques, les souvenirs enfouis qui ressurgissent, les coïncidences troublantes… les nouvelles sont des textes distincts, mais comme le cadre est le même, un lieu, une personne se retrouvent parfois d’un texte à l’autre.
Le propriétaire d’un bowling accueille ses derniers clients avant de fermer définitivement son établissement, une cuisinière crée un restaurant d’un genre nouveau, un homme a l’impression que le sol de son atelier se met à pencher, une femme collectionne des lampes à huile, un jeune garçon retrouve un cerf-volant dans son grenier. Les thèmes paraissent ténus mais cachent toujours une fêlure, un regret, un souvenir, et c’est avec beaucoup de délicatesse et de pudeur que l’auteur met au jour ces failles intimes.
Sept nouvelles seulement, cela a permis à l’auteur de créer des vrais personnages, des ambiances palpables, mais il ne faut pas s’attendre à des nouvelles à chute, et chaque conclusion peut laisser le lecteur perplexe, mais enchanté par la poésie qui l’imprègne. Un moment à part que la promenade dans la région du Marais des Neiges, petite station de ski qui sert de toile de fond à toutes les histoires.

Extrait : Quand je le vois, je n’ai vraiment pas le sentiment qu’il ait vieilli, murmura Monsieur Tanabe en lui-même. Alors qu’il allait atteindre le milieu de la soixantaine, l’atmosphère qui entourait son corps n’avait absolument pas changé avec le temps. Alors qu’autour de moi cette simplicité, cette transparence ont disparu au cours des dix dernières années. Trop de gens confondaient la simplicité, la netteté, avec l’efficacité. Ce n’était pas parce que les choses étaient efficaces qu’elles étaient forcément simples, idée manifestement incompréhensible pour les gens qui dominaient maintenant le monde. Le Marais des Neiges était peut-être une exception, mais le paysage que l’on voyait défiler le long de la route était quasiment identique à celui qu’offrait une autre ville cinquante kilomètres plus loin. On trouvait d’immenses parkings, avec au bout une construction genre préfabriqué abritant un supermarché et une salle de pachinko. L’affaissement de terrain ne menaçait-il pas le fond de la vallée plutôt que les terrasses inférieures des berges qui le soutenaient ?

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