Ludmila Oulitskaïa, Le corps de l’âme

« Et elle s’avança le long des tuyaux mouvants sur lesquels défilaient non plus des porcs, mais de la viande, et elle marmonnait en son for intérieur :
« Toute cette viande, toute cette viande, où est son âme, je vous le demande… » C’était une jeune fille dotée d’une sensibilité linguistique, à la fin de ses études secondaires, elle avait hésité entre la faculté de lettres et celle de biologie. »

Cet extrait rappelle que l’autrice était tout d’abord une scientifique, comme elle le raconte de manière romancée dans L’échelle de Jacob que j’ai lu il y a deux ans. Comme Ludmila Oulitskaïa m’avait plutôt convaincue dans la forme courte de Mensonges de femmes que dans ce gros roman, c’est avec enthousiasme que j’ai appris la sorti de ce recueil au printemps dernier, et que je m’y suis plongée. La première série de quatre nouvelles, « Les amies », présente des femmes vieillissantes, qui appréhendent leur âge et la fin de leur vie de différentes façons. Par maintes petites touches qui sentent le vécu, l’autrice a créé des personnages qui n’ont besoin que de peu de lignes pour exister, et dont les destins ne m’ont pas laissée indifférente.

« Tout le monde sait que ceux qui travaillent dans les bibliothèques, que ce soit celle de Babylone ou celle d’Alexandrie, ont été de tout temps des gens d’une race particulière – de ceux qui croient au livre comme d’autres croient en Dieu. »

Mais j’ai encore préféré la deuxième série, « Le corps de l’âme » qui comporte sept nouvelles, et pose des questions sur le corps et l’âme, celle des humains, mais aussi celle des animaux, qui s’interroge sur l’art et l’âme également… Ce dernier thème correspond à deux d’entre elles, Un homme dans un paysage de montagnes et L’autopsie, très réussies. Certaines appartiennent clairement au genre fantastique, tout en conservant le ton, la petite musique de Ludmila Oulitskaia, sa manière de montrer la vie des petites gens ou encore de ceux qui a qui la chance a souri un peu plus. Le serpentin, très belle dernière nouvelle, séduira par les images et l’émotion qu’elle procure, tous les amoureux des livres.
Bref, un recueil de textes qui peut emballer autant ceux qui veulent découvrir l’autrice russe que ceux qui admirent déjà ses livres.

Le corps de l’âme de Ludmila Oulitskaïa, (O tele douchi), éditions Gallimard, avril 2022, traduction de Sophie Benech, 208 pages.

21 commentaires sur « Ludmila Oulitskaïa, Le corps de l’âme »

    1. Si tu aimes les nouvelles, Mensonges de femmes, celui-ci ou un autre, elle a publié pas mal de nouvelles. Pour les romans, j’en connais moins, mais peut-être Sincèrement vôtre, Chourik ou Le chapiteau vert ?

      J’aime

  1. Je crois que je n’ai lu que Sonietchka d’elle, roman que j’avais beaucoup aimé. J’ai noté le dernier à sa sortie mais je me sens un peu dépassée par tout ce que j’ai envie de lire. (et ça empire d’année en année).

    J’aime

    1. Je note Sonietchka pour une prochaine lecture (éventuelle). Je suis aussi submergée par toutes ces envies de lecture, et suis obligée de faire des choix drastiques ! (je laisse aussi facilement tomber si je n’accroche pas)

      J’aime

  2. Je garde un très bon souvenir de Sonietchka lu il y a un moment, c’est assez court d’ailleurs, et même si je ne suis pas très nouvelles, je pense que ce recueil pourrait me plaire de par ses thèmes.

    J’aime

  3. Je suis un peu comme Aifelle, à savoir dépassé par tout ce que j’aimerais lire ; néanmoins, c’est une auteur dont j’ai noté le nom depuis quelques années maintenant et Sonietchka m’attend encore dans nos étagères !

    J’aime

Et vous, qu'en pensez-vous ?