Laura Alcoba, Le bleu des abeilles

bleudesabeillesRentrée littéraire 2013
L’auteur :
Romancière et traductrice, Laura Alcoba a vécu en Argentine jusqu’à l’âge de dix ans. Elle vit aujourd’hui à Paris et enseigne la littérature espagnole. Elle a déjà publié aux Éditions Gallimard Manèges. Petite histoire argentine, traduit dans de nombreux pays, Jardin blanc et Les passagers de l’Anna C.
128 pages
Editeur : Gallimard (août 2013)

Je continue, poussée par la curiosité, et de bonnes pioches à la bibliothèque, l’exploration de la rentrée littéraire… En ouvrant Le bleu des abeilles, il ne faut pas s’attendre à un roman qui joue sur des thèmes à la mode ou qui s’essaye à des recherches syntaxiques originales. Pourtant, ce court roman est rempli de charme, dû à la simplicité et à la vérité qui en émane.
Une fillette d’une dizaine d’années doit quitter l’Argentine où son père reste emprisonné, pour rejoindre sa mère qui vit déjà à Paris. Quelques leçons de français et quelques mois plus tard, elle arrive au Blanc-Mesnil, un peu loin des quais de la Seine et de la Tour Eiffel qu’elle imaginait proches de chez elle. Le froid de l’hiver, l’appartement dans la tour, le métro, les camarades de classe, la langue surtout, tout un nouvel univers est décrit à hauteur d’enfant mais sans mièvrerie.
J’ai vraiment passé un bon moment avec ces souvenirs pleins de délicatesse et d’émotion, aux côtés de cette petite fille très observatrice, qui grandit et change, mais garde un lien très fort avec son père au travers des lettres et de leurs lectures communes. Dans cet échange réside l’explication du titre, très joli fil conducteur du roman. Un livre à ne pas rater si les thèmes de l’enfance et de l’exil vous parlent !


Extrait : Avec Noémie, j’ai découvert des sons nouveaux, un r très humide que l’on va chercher tout au fond du palais, presque dans la gorge, et des voyelles qu’on laisse résonner sous le nez, comme si on voulait à la fois les prononcer et les garder un peu pour soi. Le français est une drôle de langue, elle lâche les sons et les retient en même temps, comme si, au fond, elle n’était pas tout à fait sûre de bien vouloir les laisser filer — je me souviens que c’est la première chose que je me suis dite. Et qu’il allait me falloir beaucoup d’entraînement, aussi.
Assez vite, Noémie m’a montré des caractères que je n’avais jamais vus, l’accent grave et le circonflexe, et puis le c cédille. Ce nouveau signe, plus que les autres, je l’ai tout de suite aimé : à La Plata, je m’entraînais sur des petits bouts de papier, dans les marges blanches des journaux ou au dos d’enveloppes vides, à écrire ce simple mot : français, et parfois des c cédille seuls, collés les uns aux autres, ççç, et qui formaient une sorte de chaîne ou de sillon. C’était une manière de patienter avant un départ que je croyais imminent.

15 commentaires sur « Laura Alcoba, Le bleu des abeilles »

    1. Oui, c’est autobiographique, l’auteur explique qu’elle a reconstruit à partir de ses souvenirs… Quant au titre, il est fort bien choisi par rapport à l’histoire de cette petite fille.

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