« Ils devinrent tellement proches qu’il leur semblait qu’il ne pouvait pas exister une immersion plus grande dans les profondeurs d’une autre âme et c’était un tel prologue à un avenir follement heureux qu’ils redoutaient même de s’embrasser de peur d’effaroucher le bonheur encore plus immense qui les attendait. »
Nora, jeune femme vivant à Moscou au début des années 80, tente de composer sa vie entre ses parents avec lesquels elle a des relations compliquées, sa maternité et un petit Yourik qu’elle élève seule, ses amours tumultueuses avec Tenguiz, un metteur en scène plus âgé qu’elle et enfin la mort de sa grand-mère tant aimée Maroussia. Elle retrouve une correspondance entre Maroussia et son mari Jacob, et reconstitue leurs jeunes années, tout en démêlant ses propres relations avec ses proches, et en travaillant pour le théâtre.
Roman très riche, qui plonge autant dans le monde de la littérature, de la musique et du théâtre que dans celui de la philosophie ou de la recherche scientifique, L’échelle de Jacob repose sur les lettres des grands-parents de Ludmila Oulitskaïa et est donc en très grande partie autobiographique. Il couvre une très large période du vingtième siècle russe et de l’histoire tourmentée de ce pays, avec quatre générations de personnages (qu’un arbre généalogique aide à repérer) qui se débattent pour essayer de vivre selon leurs convictions.
« Elle éprouvait un sentiment étrange et très fort : elle, Nora, la seule et unique Nora, voguait sur un fleuve avec derrière elle, se déployant en éventail, ses ancêtres, trois générations de personnes immortalisées sur des photos, avec des noms qu’elle connaissait, et derrière eux, dans les profondeurs de ces eaux, une suite sans fin d’ancêtres anonymes, des hommes et des femmes qui s’étaient choisis par amour, par passion, par calcul, sur l’injonction de leurs parents, qui avaient produit et protégé une descendance, et ils étaient une multitude immense, ils peuplaient toute la terre, les berges de toutes les rivières, ils croissaient et se multipliaient afin de la produire elle, Nora, et elle, elle produisait encore un petit Jacob et cela donnait une histoire sans fin à laquelle il était si difficile de trouver un sens, bien qu’il palpitât clairement en un fil ténu. »
Cela faisait longtemps que je projetais de relire Ludmila Oulitskaïa, ayant juste le souvenir assez imprécis d’un roman et de nouvelles lus et aimés (Le cas du Docteur Koukotski et Mensonges de femmes) J’ai donc choisi son dernier roman, un pavé sorti depuis un an en poche.
Je savais qu’il s’agissait d’un roman s’appuyant sur l’histoire de sa propre famille, et qu’il brassait les générations. Il est effectivement beaucoup question de génétique et de transmission dans ce roman, ce qui n’est pas étonnant sachant que l’auteure, avant de venir à la fiction, était généticienne. Elle a aussi écrit pour le théâtre comme la Nora du livre, et ses grands-parents ont servi de modèles aux grands-parents Maroussia et Jacob.
Malgré un cadre qui augurait un passionnant roman russe, couvrant tout le vingtième siècle, je suis restée un peu sur la réserve. De longs développements sur le féminisme, le marxisme ou la maternité ne manquent pas d’intérêt mais rompent le rythme à force d’être érudits et complets. Le parallèle entre la vie de Maroussia et celle de Nora donne de la force au texte, mais de tous les personnages, c’est Maroussia que j’ai trouvé la moins incarnée, ce qui est dommage, car elle était féministe de la première heure, communiste dans l’âme, danseuse et pédagogue, ce qui présageait d’un personnage hors du commun. Son mari Jacob a plus de chair, de profondeur, et les nombreux personnages des années 80 et suivantes aussi, et heureusement, car sinon, j’aurai trouvé le temps un peu long. Mais ne vous arrêtez pas à mon avis si ce roman vous tente, quant à moi, je relirai l’auteure dans un format plus court.
L’échelle de Jacob de Ludmila Oulitskaïa, (2015) éditions Gallimard, 2018, traduction de Sophie Benech, sorti en Folio, 808 pages.
Des avis plus positifs chez Brize et sur Babelio
Pavévasion, c’est le Pavé de l’été 2020 (chez Brize).
Pas convaincue mais tu es quand même allée jusqu’au bout…
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Oui, j’étais tout de même curieuse de savoir ce qu’il allait advenir de chacun…
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J’avais trouvé que ce livre comportait pas mal de longueurs aussi, mais comme tu le dis il est tellement riche qu’il est difficile de le rejeter complètement.
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Chacun devrait donc y trouver de l’intérêt, mais je préférais prévenir que j’avais « subi » quelques longueurs.
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Oh oh ! C’est un titre qui trainait dans mes « à lire » … pas certaine qu’il y reste ,. Je ne voudrais lire que des livres magnifiques 🙂 mais évidemment ce n’est pas possible !
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Hé oui, c’est ce que nous voudrions tous, mais comme les livres magnifiques ne sont pas les mêmes pour chacun… 😉
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Il me tentait, mais finalement j’ai opté pour un autre auteur cet été (Wallace Stegner). Tu ne me le fait pas regretter.
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Wallace Stegner, j’aime beaucoup, mais je n’ai pas encore lu son ou ses pavés…
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Les longueurs me rebutent…
Je ne connaissais ni le titre ni l’auteur.
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C’est un roman assez typiquement russe, à mon avis, et j’ai parfois du mal à les lire, je ne sais trop pourquoi, puisque a priori, le cadre m’intéresse.
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une auteure que j’aime mais comme toi je ne l’ai pas lu depuis longtemps
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Alors, tu as le choix des titres pour la retrouver…
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En format court, je te conseille De joyeuses funérailles ou Sonietchka, si tu ne les as pas lus, je les ai beaucoup aimés tous les deux. A l’inverse, j’aimerais maintenant découvrir cette auteure avec des titres plus longs mais ce ne sera sans doute pas avec celui-là, tes réticences me freinent un peu. Le chapiteau vert me tente bien..
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Merci pour les conseils ! J’avais hésité avec Le chapiteau vert, il m’aurait peut-être mieux convenu.
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J’aime beaucoup cette autrice et les fresques familiales mais ça me paraît un trop gros pavé pour se lancer et finalement être déçue
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Ce n’est que mon avis, d’autres ont adoré ! 😉
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Certes 🙂 Mais je l’ai déjà beaucoup aimé en formats courts
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j’étais certaine de noter cette lecture, mais les longueurs me rebutent alors je laisse tomber!
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Bah, je suis un peu seule sur ce coup-là… j’ai parfois du mal avec la littérature russe.
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Merci pour ton avis. Je suivrais ton conseil et choisirai un roman plus court.
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Tu ne manqueras pas de choix.
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Il ne me tentait déjà pas vraiment quand je l’ai vu passer, maintenant me voilà convaincue… de ne pas le lire !
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Mais, comme d’habitude, ce n’est que mon avis… 😉
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Tu me donnes envie de revenir à elle. Je n’ai lu qu’un roman d’elle, Sonietchka, mais j’en garde un très bon souvenir.
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Il faudra que je lise Sonietchka, il me semble en avoir lu un extrait qui m’avait plu.
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Oh, dommage… j’aime beaucoup l’autrice mais 800 pages si ce n’est pas passionnant, ce n’est pas facile.
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J’avais aimé ce que j’avais lu précédemment d’elle, mais là j’ai trouvé ce livre un peu long.
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J’ai hésité à le prendre l’autre jour et finalement, je l’ai reposé… Devant ton avis, je me dis que j’ai peut-être bien fait…
Daphné
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Peut-être te plairait-il ? ce n’est que mon ressenti… 😉
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