Chris Offutt, Le bon frère

bonfrere.png« Lentement, avec un effort considérable, il pénétra dans les bois et gravit la colline. Sa voiture était là où il l’avait garée. Les arbres étaient toujours les mêmes. Rien n’avait changé. »
La vie de Virgil, dans ses collines du Kentucky, pourrait sembler étriquée, il n’a jamais quitté sa vallée, mais cela lui va très bien. Son travail lui offre des possibilités de promotion, il a une amie qui n’attend qu’un signe de lui pour commencer une vie à deux. Quatre mois après la mort de son frère Boyd, il ne peut toutefois plus ignorer les remarques, qui sont presque des injonctions à venger la mort de celui-ci. Virgil, tout à l’opposé de son frère, n’est pas quelqu’un d’impulsif, il prend le temps de peser toutes les options, sachant que même s’il choisit de laisser le meurtrier en vie, il ne pourra de toute façon plus rester au milieu des siens.

« Ils buvaient, ils aimaient, ils se battaient, et Joe aurait aimé être l’un des leurs, mais il savait qu’il ne le serait jamais. Il était fatigué d’essayer d’être comme tous les autres. »
Chris Offutt est un auteur que j’ai remarqué il y a quelques temps, et d’autant plus au printemps, lors de la sortie de son roman Nuits appalaches. J’ai donc enfin sorti ce roman de ma pile à lire. Les premières pages, mettant en place le personnage ont éveillé mon intérêt sans m’emballer plus que ça, si ce n’est le style assez remarquable. Mais au bout de quatre-vingt pages environ, un tournant dans l’histoire la rend tout à fait passionnante et difficile à lâcher. On se trouve dans la tradition du roman noir américain, mais avec un petit quelque chose en plus, un supplément d’âme. La nature, plus qu’une toile de fond, fait partie du personnage, mais ce sont surtout les choix qu’il doit faire, et l’évolution de son caractère qui sont intéressants. L’aspect presque documentaire sur certaines communautés américaines bien particulières, dont je parle sans trop en dire, puisque même la quatrième de couverture ne les mentionne pas, ajoute une dimension sociale à cette histoire. L’Amérique profonde ne manque jamais de nous étonner, et pas toujours dans le bon sens. Le thème initial, qui ferait déjà un bon roman, est largement dépassé, élargi, amplifié… Qu’est-ce que la liberté, jusqu’où peut-on aller en restant libre ? Un roman riche et remarquable. Je ne manquerai pas de me pencher sur les autres romans de Chris Offutt.

Le bon frère, de Chris Offutt (The good brother, 1997), éditions Gallmeister (2018), traduction de Freddy Michalski, 375 pages.

Objectif PAL d’octobre (les livres lus sont à retrouver ici)

36 commentaires sur « Chris Offutt, Le bon frère »

  1. Je ne connais pas cet auteur, voilà que tu me le fais ajouter à ma liste américaine. Très intrigant ton billet, j’aime que tu n’en dises pas trop.

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  2. De toute évidence, Offutt est un auteur qui mérite qu’on s’y intéresse. J’avais commencé à me renseigner sur son œuvre; tu confirmes qu’il me faut faire mieux que ça : le lire 🙂

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  3. un auteur que j’aime énormément, j’ai lu ce roman il y a assez longtemps et je l’ai beaucoup aimé mais il y a un livre que j’aime encore plus mais que je crois indisponible en ce moment et donc à chercher d’occasion : les hommes ne sont pas des héros chez mercure de france, c’est vieux ça date de 2004 mais j’avais été enthousiasmé par ce livre à l’époque

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  4. Tiens, en triant de vieux Telerama j’ai lu une critique sur cet auteur, et deux billets de bog aujourd’hui! c’est un signe 😉 J’ai vu qu’il avait publié un recueil de nouvelles, je pense commencer par ça.

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