Jean-Baptiste Andrea, Cent millions d’années et un jour

centmillionsdanneesRentrée littéraire 2019 (3)
« En bon scientifique, j’aurais du savoir qu’il n’y avait pas de hasard. Derrière chaque événement, deux mains qui se frôlent, un astre qui dévie, un chien qui part et qui ne revient pas, des milliards de rouages tournent depuis des éons. »
C’est un hasard, pourtant, qui permet à Stan, un paléontologue plus tout jeune et un peu casanier, de partir sur les traces d’ossements du secondaire. La description qu’il en a, même si elle n’est pas de première main, lui laisse imaginer un animal jamais découvert encore. Il ne lui faut pas longtemps pour envisager une expédition estivale au pied d’un glacier des Alpes, près de la frontière italienne. Il a assez d’éléments pour localiser le squelette. Il entraîne avec lui Umberto, son ami paléontologue italien, ainsi que Peter, un allemand, et ils auront l’assistance de Gio, un guide de haute montagne. On est en 1954, ils seront isolés sans moyen de communiquer et devront redescendre dès les premiers signes, même très précoces, de l’hiver.

« – Une montagne, tu ne sais jamais si tu la retrouveras où tu l’as laissée.
Les deux hommes continuent d’avancer du même air grave. Je viens de bénéficier de la sibylline sagesse des Dolomites. Ou alors, ces rudes créatures ont un sens de l’humour que je ne soupçonnais pas. »
Jean-Baptiste Andrea raconte là une superbe histoire d’amitié entre ces hommes, qui se trouvent réunis dans des conditions extrêmes et dans un isolement complet. Mais c’est aussi, au fil des souvenirs du narrateur, une ode à un amour filial, entre mère et fils, forgé sur une solidarité sans faille dans l’adversité. Cependant, c’est toujours par petites doses, sans lourdeur, que le passé fait irruption, il s’agit juste de cerner la personnalité de Stan, qui s’avère très attachant.
Les mots sonnent juste, le style emporte et convie le lecteur à arpenter les glaciers, à bivouaquer dans le froid, à rêver avec les personnages, à partir à l’assaut de sa propre montagne.

« Deux jours que j’agresse la glace, le visage fouetté d’étincelles froides à chaque impact de la pioche ou du piolet. »
À coups de phrases courtes, ce style personnel, très imagé, fait merveille. J’ai été sous le charme tout du long. Et il n’y a pas que le style, il y a une histoire dans laquelle il faut pénétrer pas à pas, coup de piolet après coup de piolet, nuit étoilée après nuit étoilée.
J’ai découvert Jean-Baptiste Andrea avec ce deuxième roman, et je vais sans nul doute chercher son premier, Ma reine, dont le thème m’avait moins attirée, mais si l’écriture est aussi belle, je risque d’être également éblouie. Quant à Cent millions d’années et un jour, si vous avez aimé Les huit montagnes de Paolo Cognetti, je pense que vous pouvez vous y risquer sans crainte.

Cent millions d’années et un jour, de Jean-Baptiste Andrea, éditions de l’Iconoclaste, août 2019, 309 pages.

 

39 commentaires sur « Jean-Baptiste Andrea, Cent millions d’années et un jour »

  1. Moi, les montagnes, c’est vraiment pas mon truc, je n’ai jamais compris comment on pouvait grimper vers le haut, alors qu’il suffit pour être heureux de plonger dans la mer …. En montagne, il n’y a même pas de vagues ! ^-^. Mais si l’écriture est belle, je vais quand jeter un oeil du côté de Ma reine, alors …

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  2. Je n’ai encore jamais lu cet auteur mais tout ce que tu dis de ce roman me tente beaucoup.
    (Je ne sais pas comment je vais faire pour lire tous les romans de cette rentrée qui me tentent…)

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  3. Le thème m’attire beaucoup… et comme j’ai aimé les huit montagnes, il semblerait que je ne prenne pas beaucoup de risque à me plonger dans celui-ci!
    Daphné

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