Rentrée littéraire 2019 (1)
« Elle avait beau prétendre avoir tout oublié, je n’ai jamais cru qu’on puisse effacer une jeunesse new-yorkaise de sa mémoire comme on gratterait une peinture écaillée. Elle avait forcément, j’insiste encore aujourd’hui, respiré un jour l’odeur de la liberté. »
J’avais beaucoup aimé L’an prochain à Tbilissi, le recueil de nouvelles de Sana Krasikov, aussi n’ai-je pas hésité à postuler pour lire ce premier roman, sur lequel l’auteure a travaillé une dizaine d’années, et qui n’est pas autobiographique, mais inspiré par la vie de certaines de ses connaissances.
Dans les années 30, Florence Fein, jeune juive idéaliste parlant russe, travaille pour le gouvernement américain en tant qu’interprète. Une histoire d’amour, ainsi que l’image idéalisée qu’elle se fait de l’URSS, la poussent à quitter sa famille, et partir d’abord à Moscou puis à Magnitogorsk, une ville minière éloignée de tout. Elle va rester en Union Soviétique. Malgré les difficultés, la répression, elle semble ne jamais avoir perdu de vue cette image idéale, même lorsque son entourage la pousse à retourner aux États-Unis, bien des années plus tard. En 2008, son fils Julian, qui conçoit des navires brise-glaces, doit se rendre à Moscou pour des négociations qui s’annoncent compliquées.
Il m’a été utile au début d’écrire une petite chronologie des faits, parce qu’entre 1934 et 2008, il se passe beaucoup de choses dans cette famille, un certain nombre de départs et de retours, et le roman fait aussi des allers et retours, mais finalement, avec les dates en début de chapitres (sous forme de visas, c’est original et amusant), il n’est pas compliqué de s’y retrouver.
J’ajoute qu’un roman qui laisse des questions en suspens dès les premières pages, j’aime vraiment ça, à condition que le rythme suive, et c’est ici le cas.
« Elle se découvrit un talent pour collectionner clichés, expressions locales, platitudes et banalités en tout genre, puis pour les enchaîner avec tant d’adresse qu’une oreille inexpérimentée l’aurait presque prise pour une Moscovite. »
Roman imposant sans être compliqué, il se singularise par ses narrateurs différents. Julian exprime lui-même ses tribulations dans la Russie de Poutine, et Florence est racontée à la troisième personne, sans que cela la rende plus lointaine, mais au contraire lui donne un vrai statut d’héroïne romanesque, embourbée dans l’Union soviétique stalinienne. La Florence que son fils a connue (retrouvée, en réalité, mais c’est une partie de l’histoire qu’il vaut mieux ne pas dévoiler) n’a jamais renoncé à défendre ses idéaux de jeunesse, et n’a jamais non plus répondu à nombre de questions que Julian se posait. Aussi montre-t-il un grand intérêt pour le dossier du KGB de sa mère qu’il va pouvoir enfin consulter. Florence serait à elle seule un superbe personnage de roman, du genre qu’on n’oublie pas, mais avoir ajouté les histoires de son fils et son petit-fils prolonge largement l’intérêt, et fait réfléchir aux répercussions de certains choix radicaux, sur les générations suivantes.
« Voilà peut-être comment tout a commencé pour moi : garder un secret, leçon un. »
J’ai beaucoup aimé également les portraits des personnages secondaires, souvent acides, et tracés en quelques mots bien choisis, j’y ai retrouvé l’art déployé par l’auteure dans ses nouvelles.
Le roman permet aussi d’aborder des aspects historiques passionnants, et que je ne connaissais pas, je l’avoue : l’abandon par leur propre gouvernement de milliers de juifs américains installés en URSS, et, plus tard, la répression stalinienne contre le Comité antifasciste juif, et la « Nuit des poètes assassinés ».
Cette lecture qui m’a enchantée devrait plaire, me semble-t-il, à ceux qui ont aimé Nathan Hill et ses Fantômes du vieux pays et, comme pour ce roman, vous allez peut-être le laisser passer maintenant, trop de sollicitations, trop de tentations, et tout, et tout, mais vous y reviendrez plus tard, je n’en doute pas !
Les patriotes de Sana Krasikov (The patriots, 2017) éditions Albin Michel, 21 août 2019, traduction de Sarah Gurcel, 592 pages.
Dans ma pile, épaisse, mais on avance! J’ai adoré Les fantômes du vieux pays, alors je pense que ce livre n’attendra pas trop. Merci pour cet article !
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Tant mieux s’il n’attend pas trop ! Bonne lecture !
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Avec un billet pareil, il se retrouve évidemment en tête de liste. La bibli me demande des suggestions pour la rentrée, ils ne vont pas être déçus du voyage 😉
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Ce roman est une excellente suggestion à proposer ! (tous les lecteurs n’aiment pas les autofictions bien de chez nous !)
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Si tu parles de N Hill, je suis fichue! Mais rien ne presse…
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Non, heureusement, les livres ne se périment pas…
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Belle chronique, bien écrite et qui donne envie ! Merci
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Merci, j’espère bien attirer quelques lecteurs vers ce roman qui le mérite…
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pourquoi pas ? je n’ai rien lu de cette auteure… Ma liste spéciale rentrée commence à perser très lourd 🙂
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C’est son premier roman, après des nouvelles très remarquables… Ma liste de rentrée prend forme aussi (mais j’en barre certains) 😉
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Tu sais donner envie, oui ! Je note mais pour pus tard, oui 😉
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Un « vrai » roman, avec de beaux personnages. Je suis ravie du voyage !
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Eh bien je le note celui-ci, il semble avoir pas mal d’atouts pour me plaire et je pense que je serai bien contente de le trouver d’ici quelques semaines lorsque l’effervescence de la rentrée sera retombée. J’avais plutôt apprécié Les fantômes du vieux pays, lu très récemment.
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Il devrait te plaire, il a les atouts d’un roman américain et ceux d’un roman russe à la fois !
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J’avais beaucoup aimé Les fantômes du vieux pays, alors forcément, je note !
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Tu ne devrais pas être déçue !
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Et bien voilà, pour moi qui n’aime pas les autofictions françaises, qui ai adoré Les fantômes du vieux pays, c’est cuit, il faut que je lise celui-ci ! Je le note.
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A la fois un roman américain et un roman russe, ça devrait t’aller, non ? 🙂
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ah celui là je note immédiatement je ne l’avais pas repéré du tout, mais en bonne fan de la Russie je le mets sur ma liste même si la lecture est un rien différé j’ai déjà une jolie pile qui m’attend
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Je remarque plein de romans sur le thème de la Russie, en ce moment !
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Ah, je l’avais noté, tu confirmes, parfait 🙂
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J’espère que ce roman ne va pas être noyé dans la rentrée littéraire.
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Il devrait me plaire. On verra s’il croise ma route. J’ai « les fantômes… » dans ma liseuse mais va savoir si celui-ci ne passera pas avant !
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Ce serait intéressant de voir si tu leur trouves aussi quelques points communs !
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Voilà un roman qui a tout pour me plaire, je note!
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Il aborde des thèmes intéressants, tout en étant parfaitement romanesque.
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J’ai tellement aimé Nathan Hill ! Alors je note je note !
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J’espère que tu aimeras autant celui-ci… L’air de ressemblance que je leur trouve n’est que mon sentiment.
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Ah oui, bien tentée par celui-là pour ses thèmes et aspects historiques mais oui, voilà, pour l’instant ça va être à la queue comme tout le monde.;)
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Je comprends ça, mais parfois, les priorités changent ! 😉
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je ne connaissais pas et tu parais séduite. Je le retiens!
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Oh, oui, un roman à retenir!
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Je n’avais même pas jeté un œil à ce roman, j’avoue, je pensais qu’il n’était pas pour moi. Au lu de ta belle chronique enthousiaste, je viens de changer d’avis. Le Nathan Hill m’attend en poche. Si j’accroche, je lirai celui-ci ensuite !
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Cette comparaison entre les deux m’est toute personnelle, mais je pense tout de même qu’ils devraient séduire les mêmes lecteurs…
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Tiré au sort lors du dernier Mai en Nouvelles, j’ai reçu le recueil de nouvelles de l’auteur, que j’ai prévu de lire pendant mes vacances. Ça devrait me donner un bon aperçu de ce que je peux attendre de ce roman (et puis, N. Hill, quand même, c’est pas rien !)
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Ces nouvelles sont parfaites pour faire connaissance avec l’auteur…
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très obligeamment mon libraire m’a prêté son service de presse et je dois dire que j’ai beaucoup aimé il y a quelques longueurs et un peu trop de détails sur l’aspect des transactions financière mais ce sont des péchés véniels un bon roman et pour un premier roman c’est une vraie réussite
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Je suis contente de l’avoir lu, et avoir commencé ma rentrée littéraire avec l’a placée sous de bons présages ! 🙂
C’est vrai, quelques passages m’ont un peu moins parlé, mais si peu !
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je viens de voir ton article et je suis d’accord avec toi. Un bon livre un peu touffu.
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Un bon souvenir de lecture, mais en ce moment, j’aurais du mal à lire ce genre de pavé.
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