Abby Geni, Farallon Islands

farallonislands« J’ai regardé autour de moi à la recherche de mon assistant inconnu. Mais la silhouette derrière la vitre de la grue avait disparu elle aussi. Qui que soit la personne envoyée pour faire fonctionner la grue, elle n’avait pas cru bon de se présenter, de m’aider à porter les bagages et de m’accueillir sur les îles. »
J’ai de la chance en ce moment dans le choix de mes lectures, en voici encore une qui m’a enthousiasmée, un très beau roman paru avant l’été chez Actes Sud. Miranda, une jeune femme qui vient réaliser une série de photos pour un projet sur les îles Farallon se rend vite compte que ces îles de la côte californienne sont tout sauf hospitalières avec des courants marins et des vents pas vraiment pacifiques. Si en plus les rares êtres humains, des scientifiques qui restent à l’année dans les lieux, sont d’un commerce peu agréable… En dépit de hordes de souris, d’un poulpe nommé Oliver et même d’un fantôme, Miranda se prend rapidement à adorer les îles Farallon, leurs colonies de phoques, leur lumière et leur météo capricieuse. « A ma plus grande surprise, ça y est. En fait, c’est arrivé ce matin : je me suis réveillée à l’aube et les îles m’étaient familières. » Ce roman m’a rappelé un livre que je n’ai pas commenté, même si je l’ai beaucoup aimé, San Miguel de T.C. Boyle, qui a pour cadre une autre île au large de la Californie, mais qui l’aborde de manière plus ancrée dans l’histoire.

« Les gens imaginent souvent que prendre des photos les aidera à se souvenir précisément de ce qui est arrivé. En fait, c’est le contraire. J’ai appris à laisser mon appareil au placard pour les événements importants parce que les images ont le don de remplacer mes souvenirs. »
Je vous préviens tout de suite, ce roman est difficile à lâcher. On se prend à éprouver aussi une sorte d’exaltation devant ces îles, et à être plus qu’intrigué par les comportements des compagnons de la jeune femme. Bien plus qu’un roman d’atmosphère, ou un thriller maritime, ce livre est traversé par le thème de la perte, celui de la reconstruction de soi, de la solitude. Miranda n’est pas encore remise de la mort de sa mère lorsqu’elle était adolescente, faisant en cela penser à la jeune fille des Règles d’usage de Joyce Maynard. Bien qu’elle soit trentenaire, elle n’a jamais pu encore s’installer quelque part, parcourant le monde pour des reportages. Au fur et à mesure de la lecture, le lecteur comprend la direction prise par l’auteure. Est-ce que ce sera le fantastique, les rapports humains, le rapport à la nature, la résilience ou un autre sujet qui sera le thème central du roman ? Je ne vous le dirai pas pour préserver une future lecture, mais sachez que la richesse de ce roman vous surprendra.

Farallon islands d’Abby Geni (The lightkeepers, 2016) éditions Actes Sud (juin 2017) traduit par Céline Leroy, 384 pages

De grandes voyageuses se sont risquées avant moi sur les îles Farallon : Ariane, Cuné, Papillon et Sandrine.

Première lecture pour le mois américain.
america

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35 commentaires sur « Abby Geni, Farallon Islands »

  1. et bin si tu aimes les histoires d’ile bizarre je pourrais te conseiller « l’Invention de Morel » de Bioy Casares (un grand ami de Borges)…car lala tu me donnes envie de le lire celui de Geni…;)

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  2. Ouh là là là moi je suis phobique des rats et des souris et le début de ton billet commence mal car quand tu parles de hordes de souris j’ai les poils qui se dressent. Bon si on ne les voit pas pendant tout le roman ça va et comme il a l’air très bon je note oh, ça me ferait bien envie en ce moment ce genre de lecture qu’on ne lâche pas.😉

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    1. Non, que cela ne t’empêche pas de noter ! Ces souris n’ont pas de prédateurs sur l’île, il en est question sur quelques paragraphes, au moment où le personnage principal découvre leur nombre, mais rien de rédhibitoire !

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  3. Mais je suis tellement d’accord avec la citation des photos et des souvenirs !
    Bon, sinon, je ne suis pas sûre que les thématiques me correspondent mais ton enthousiasme rend ce roman assez intrigant. A voir…

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    1. Ce n’est pas à proprement parler un thriller, quoique l’éditeur le vende comme ça « entre thriller psychologique et expérience de survie », je cite ! Je trouve qu’il va au-delà d’un simple thriller.

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    1. Tu vois, je trouve des citations qui répondent à tes questions ! Toi qui aimes l’Islande, cette île et ce roman m’ont un peu rappelé des romans islandais. Et puis le thème de la photo, et puis, et puis… 🙂

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  4. Au moins deux accroches pour me convaincre, la photo et les îles. Je suis une fanatique des îles, je ne sais pas pourquoi, je me dis toujours que rien ne peut y arriver de grave, vu que le monde est loin. Ben, on dirait que je vais devoir changer d’avis !

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