Andrée A. Michaud, Bondrée

bondree« Il lui faudrait classer cette affaire parmi celles qui vous hantent longtemps après que la poussière est retombée, les cas boomerangs, ainsi qu’il les nommait, qui vous reviennent en plein visage un soir d’été, alors que vous buvez tranquillement une bière dans le jardin, et vous pourchassent jusqu’aux premières neiges, sinon jusqu’à Noël. »
Cela faisait un moment que j’avais repéré ce roman et bien envie de le lire, tous les avis étant assez unanimes à son sujet. Le roman démarre assez lentement, en annonçant de manière voilée ce qui va ce passer, à savoir qu’une jeune fille va disparaître. J’ai bien aimé ce début subtil et installant l’ambiance petit à petit. A l’été 1967, les alentours d’un paisible lac de vacances dans une région frontalière, entre Québec et état américain du Maine, sont un lieu où plane une légende, celle Landry, le trappeur amoureux malheureux d’une femme à la robe rouge flamboyante. Les jeunes filles qui fréquentent le lac sont tout aussi brillantes, surtout Zaza Mulligan et Sissy Morgan, « les princesses de Boundary, les lolitas rousse et blonde qui faisaient baver les hommes depuis qu’elles avaient appris à se servir de leurs jambes bronzées pour appâter les regards. »

« Il était revenu à son idée de départ, la mort n’avait de sens que si le cœur s’arrêtait de fatigue, que si elle était le résultat d’un geste conscient, d’une trop grande inadaptation à la vie. »
Le thème de la mort omniprésente et l’atmosphère délétère qui envahit petit à petit ce lac, pourtant évocateur de loisirs en famille, sont bien rendus par l’auteure, mais au bout d’un moment, mon intérêt a faibli parce que je n’ai pas réussi à m’accoutumer au style à la fois lyrique et basé sur un certain nombre de répétitions, et ponctué de phrases dites en anglais, ou répétées en anglais puis en français. Le lieu induit ce mélange de langues puisque les vacanciers autour du lac de Bondrée sont tant québécois qu’américains du Maine, comme le policier en charge de l’enquête, mais cela m’a semblé assez fabriqué. Le mélange de roman noir et de poésie n’a pas fonctionné pour moi. Dans un roman, je suis sensible à la musique des phrases et cette composition n’a pas résonné agréablement à mes oreilles. Je précise que ce n’est nullement une question de lenteur du roman, je ne suis pas fan des thrillers où l’action est privilégiée à la psychologie, non, j’aurais pu m’accommoder de cette relative lenteur, mais j’ai eu vraiment du mal avec le style.

« Michaud aurait voulu imprimer ce tableau dans un album parlant d’immortalité, deux fillettes et un chien dans la lumière de l’été, le photographier en vue de le garder à portée de la main, pour les moments durs, pour pouvoir l’opposer aux tableaux rongés de grisaille qui encombraient son esprit, mais il savait la chose inutile. »
Certes, l’auteur réussit parfaitement à créer une ambiance inquiétante à souhait, à faire intervenir différents narrateurs avec fluidité, à installer des points de vue originaux, notamment celui de la petite Andrée qui observe tout, rêve de faire comme les jeunes filles qu’elle regarde, et qui comprend bien plus que les adultes ne l’imaginent. Je me rends bien compte que je suis relativement seule à ne pas être emballée par l’écriture de ce roman, mais cela permettra de relativiser un peu les attentes des futurs lecteurs, sans les décourager pour autant.

Bondrée d’Andrée A. Michaud, éditions Rivages (2016) prix des lecteurs Quais du Polar 2016, 363 pages

Les avis sont élogieux, d’Aifelle et Cathulu à Eva, parmi beaucoup d’autres…

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29 commentaires sur « Andrée A. Michaud, Bondrée »

  1. J’ai eu nettement moins de mal que toi avec le style du roman, à part les phrases en anglais non traduites. Mais voilà, c’est tout-à-fait vrai qu’il y a autant de lectures que de lecteurs(trices) 😉

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  2. Repéré chez Aifelle, merci de mettre un bémol, cela me conforte à la fois dans mon envie de le lire quand même (j’aime bien les thrillers, même fabriqués et pas très bien écrits, ben oui …), et dans ma bonne résolution d’attendre tranquillou sa sortie en poche !

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    1. C’est un bémol tout à fait personnel, d’autres ont au contraire beaucoup aimé le style lyrique et un vaguement hypnotique… 😉 (j’en ai lu des beaucoup moins bien écrits)

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  3. A vrai dire, il ne m’attire pas du tout de toute façon… Le style d’un livre, pourquoi touche-t-il une personne et pas du tout une autre…

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  4. Ton avis est en effet plus nuancé que d’autres. Moi souvent je ne suis pas bien en phase avec les styles dits poétiques, surtout si c’est lent…

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  5. Il ne me tente pas trop, j’aime bien les romans d’ambiance ou psychologiques mais il faut en effet que j’accroche au style. Je n’ai pas exemple pas du tout adhéré à « Tout ce qu’on ne s’est jamais dit » tant l’écriture glissait sur moi.

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  6. Après ton commentaire chez moi je suis venue lire ton avis ! Je crois que je comprends ce qui t’a gênée et qui a bien fonctionné chez moi. Pour autant je l’ai lu un peu en diagonale et je n’en fais pas un coup de coeur !

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