Jonathan Coe, Numéro 11


numero11« Elle l’avait vue de l’œil des caméras, de l’œil de ceux qui avaient monté l’émission; or cet angle-là ne pardonnait pas. Il ignorait le filtre de l’amour. »
Il est encore temps de découvrir des romans de la précédente rentrée littéraire, qui n’ont encore rien perdu de leur force, comme ce roman de l’auteur britannique Jonathan Coe. Composé en cinq grandes parties qui semblent de prime abord indépendantes, le roman commence avec une « nouvelle » à la manière d’Enid Blyton, et des références à Alfred Hitchcock, texte qui soulève le thème de l’esclavage moderne et de la mondialisation. Cela vous semble improbable et saugrenu ? Sous la plume de l’auteur anglais, rien n’est impossible !

« Plusieurs semaines déjà qu’il n’était plus assiégé par les micros et les caméras. Arrêter le rédacteur en chef d’un journal national qu’on soupçonnait du meurtre de deux humoristes en vue avait toutes les chances de le ramener sous les feux des projecteurs. »
La deuxième partie est une satire de la société de spectacle dont le ton rappelle un des précédents romans de Jonathan Coe, La vie privée de Mr Sim. Les autres parties voient réapparaître des personnages déjà vus, et la manière dont les histoires sont reliées les unes aux autres est réjouissante. L’auteur profite de ce qu’il raconte pour dresser un portrait à charge de l’Angleterre contemporaine et de ses dirigeants, au travers d’histoires où les personnages se croisent, se trouvent et se retrouvent, évoluent dans des univers qui vont de l’extrême pauvreté à la richesse insolente, du milieu de la presse à celui de l’art ou de la télé-réalité.

« Moi, je pourrais vous raconter ce qui arrive quand on est trop nostalgique de son innocence. »
Le roman se déroule sur une douzaine d’années et les personnages qui parcourent les cinq parties, Rachel et Alison, évoluent de douze ans à vingt-cinq ans, de monde de l’enfance à celui de la perte des illusions. Elles passent d’un univers mystérieux qui propose des réponses simples, à un monde non moins opaque mais régi par des mécaniques de profit et de pouvoir autrement plus compliquées. Et le lecteur, la lectrice, pendant ce temps ? Il savoure ce roman aussi intelligent que passionnant !


Numéro 11, de Jonathan Coe, éditions Gallimard (octobre 2016) traduit par Josée Kamoun, 448 pages

Les avis de Delphine-Olympe, Keisha, Krol et Lewerentz.
Du même auteur, sur le blog : Désaccords imparfaits, des nouvelles !

44 commentaires sur « Jonathan Coe, Numéro 11 »

  1. J’ai toujours Testament à l’anglaise et La pluie avant qu’elle tombe dans ma PAL mais je n’accroche pas, j’ai un peu de mal, peut-être un jour ! D’ailleurs malgré mes difficultés à le lire j’ai failli acheter celui-ci à la gare cet été…comme quoi je ne désespère pas de trouver le bon angle ! 😉

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  2. Je viens juste de découvrir cet auteur avec Testament à l’anglaise, que j’ai adoré… j’avais noté ce titre chez Athalie, qui était, de mémoire, aussi enthousiaste que toi..

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  3. Bien sûr qu’il est encore temps de découvrir les romans des précédentes RL, ou même hors RL.:-) Et celui-ci figure en bonne place dans ma LAL, tout comme d’autres titres du même auteur. J’aime vraiment beaucoup son écriture.

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  4. j’ai trois romans en attente encore chez moi : « le cercle fermé », « testament à l’anglaise » et « La pluie avant qu’elle ne tombe ». C’est un auteur que j’aime bien, découvert avec « expo 58 » que j’avais adoré !

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  5. Je ne peux que te rejoindre « incongru », oui, mais aussi implacablement maîtrise ! Le mélange des genres peut dérouter, mais Coe, faut se laisser embarquer, moi, ça marche à tous les coups (mais je manque complètement d’objectivité !)

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