Colin Niel, Seules les bêtes

seuleslesbêtesIl y a un engouement certain pour le roman noir rural en ce moment, avec notamment les romans de Franck Bouysse, dont j’ai déjà parlé, sans être totalement convaincue. Colin Niel avait, lui, situé ses premiers romans en Guyane où il travaillait, il vient ici établir son roman dans une campagne isolée, sur un causse qui se désertifie…

« J’avais l’impression de faire un truc un peu fou. Je sais, il y a pire comme folie mais pour moi c’était déjà beaucoup. Il avait fallu quarante-deux ans pour ça, pour que je me comporte comme l’adolescente que je n’avais pas été quand j’en avais l’âge. »

Une femme, Evelyne Ducat, disparaît au cours d’une randonnée solitaire, seule sa voiture est retrouvée, mais pas de traces ou d’indices. Alice, l’assistante sociale dont le rôle est de venir en aide aux agriculteurs que leur isolement fragilise, prend d’abord la parole au sujet de l’enquête menée par la gendarmerie locale, et de Joseph, l’agriculteur dont elle est devenue proche, et qui pourrait bien avoir des raisons d’en vouloir au mari d’Evelyne Ducat. Quatre autres personnages vont intervenir à la suite d’Alice, chacun apportant son passé, son point de vue sur le mystère qui entoure cette disparition, suivie d’une autre, et levant le voile petit à petit…

« Je ne sais pas comment c’est pour les autres, mais moi la solitude, je dirais pas que je l’ai voulue. Et elle m’est pas tombée dessus du jour au lendemain. Non, c’est venu lentement, j’ai eu le temps de la voir arriver avec les années, de la sentir m’entourer comme une mauvaise maladie. »

L’organisation du texte, qui laisse la parole à plusieurs personnages dans cinq grandes parties, convient parfaitement au déroulement de l’histoire. J’ai trouvé aussi que chaque voix était bien différenciée, bien représentative de l’individu qu’elle incarnait. Le thème de la solitude est central, des amours se nouent pour tenter d’y remédier, mais au final, le constat est loin d’être tout rose… ni tout noir, d’ailleurs. Ce roman m’a tenu en haleine, au-delà de la simple distraction, en posant des questions intéressantes sur le monde rural. Un roman sombre mais touchant !
Et si vous vous demandez ce que la couverture a à voir avec l’histoire que je résume ici, il vous faudra lire le livre, il ne sera pas dit que je vais divulguer des points cruciaux.

 


Seul les bêtes de Colin Niel, édité par le Rouergue (collection Rouergue Noir, janvier 2017) 213 pages, Prix polar en séries Quais du Polar 2017, prix Landerneau polar 2017.

Les avis de Baz-art, Itzamna et Jean-Marc.

33 commentaires sur « Colin Niel, Seules les bêtes »

  1. J’ai vraiment aimé ce livre; connaissant bien le lieu où ça se déroule, connaissant bien le monde rural aussi, j’ai trouvé comme toi des questions pertinentes, des portraits convaincants, un regard sur la solitude accablante dans certains lieux de notre pays, et puis l’humour aussi.

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  2. J’aime que l’on n’ idéalise pas le monde rural . Aujourd’hui comme hier c’est un monde rude, en plus comme ce monde est loin des lieux de vie et du monde moderne, son organisation sociale est fissurée et est d’une grande pauvreté économique, culturelle et humaine.

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  3. Je suis en ce moment en vacances en zone d’hyperuralité, pour employer la classification de Sylvain Tesson, la seule que j’ai sous la main … Et même sous un beau soleil, on ne peut que voir les villages désertés et la minceur des offres culturelles ! Ce qui est exotique pour nous en vacances ne doit certainement pas l’être quand on vit tout les jours cette réalité rurale. Pour le roman, je note ce titre, j’ai bien aimé pour ma part le premier roman de Bouysse, son atmosphère plus que son intrigue, en fait.

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    1. J’ai préféré celui-ci à Plateau où j’avais trouvé artificielle l’accumulation de malheurs… J’ai trouvé plus de nuances ici, mais ce n’est que mon point de vue ! 🙂 Et je suis d’accord que ce qui nous plaît en quelques semaines de vacances doit devenir pesant à la longue…

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  4. Lu récemment, j’ai bien aimé… mais cette vilaine couverture a fait que j’ai deviné beaucoup trop de choses trop tôt. C’est HYPER bien construit par contre. Tout se tient!

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