Zeruya Shalev, Douleur

douleur« Le passé désagrège l’avenir, le passé réduit l’avenir en poussière. »
Cela faisait un moment que je voulais découvrir l’écriture de Zeruya Shalev, depuis qu’elle était venue aux Assises Internationales du Roman en 2015 pour parler de Ce qui reste de nos vies. Je n’ai pas eu l’occasion de trouver ce roman à la bibliothèque, mais le dernier en date, Douleur, était parmi les nouveautés, et je me suis jetée à l’eau, imaginant une lecture des plus ardues. Pas du tout ! Douleur, malgré son titre et sa couverture assez rébarbatifs à mon goût, est un texte fluide, dense, mais sans longueurs.

 

« …il avait rapidement remis main et compassion dans sa poche et ça, elle ne lui avait jamais pardonné, aujourd’hui encore, elle lui en voulait, à Ethan Rozenfeld, son premier amour et d’une certaine manière son dernier, car elle n’avait plus jamais retrouvé cette évidence totale et absolue, impossible à remettre en cause. »
Iris, mère de famille d’une quarantaine d’années, a du mal à revenir sur ce qui s’est produit dix ans auparavant, lorsque, venant de déposer ses enfants à l’école, un bus a explosé juste à son passage. Grièvement blessée, elle a subi plusieurs interventions et des mois de rééducation. Les douleurs ressurgissent pile dix ans après, qui la poussent à consulter un centre anti-douleur. Elle y retrouve son premier amour de jeunesse, qui l’avait quittée quand elle avait dix-sept ans. Elle s’interroge sur ses sentiments pour lui. En même temps, sa fille qui vit et travaille à Tel-Aviv lui cause beaucoup d’inquiétude, sans compter son fils qui va bientôt être appelé à accomplir son service militaire…

 

« Nous ne cessons de nous mettre en situation d’échec pour tester jusqu’où nous arriverons à faire face et à prendre sur nous, un enfant de plus, du travail et un crédit en plus, ridicules Sisyphe que nous sommes ! »
De nombreux thèmes s’entrecroisent dans le roman de Zeruya Shalev, comme dans l’esprit d’Iris, habituellement efficace dans son rôle de directrice d’école comme dans celui de mère de famille, et qui se trouve, et pas seulement à cause de la douleur, complètement déboussolée… Les relations amoureuses, le féminisme, l’éducation des enfants, le rôle de l’école, la dépendance ou la solitude, autant de thèmes abordés par l’auteure qui s’est trouvée dans une situation analogue à celle d’Iris, gravement blessée il y a une dizaine d’années dans les rues de Jérusalem, et qui a réussi enfin à écrire sur cette douloureuse expérience, tout en parcourant des thèmes universels, qui parleront à chacun.

Douleur de Zeruya Shalev, éditions Gallimard (janvier 2017) traduit de l’hébreu par Laurence Sendrowicz, 400 pages

Les avis d’Itzamna partagée, et de Ludovic enthousiaste.
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32 commentaires sur « Zeruya Shalev, Douleur »

  1. Un peu comme Papillon. J’avais un peu peur que ce soit ardu à lire, mais visiblement, ce n’est pas du tout le cas. Ce n’est pas une lecture pour moi en ce moment, mais quand je retrouverai un peu de calme, de sérénité et que mon cerveau sera à nouveau en état de fonctionner correctement (j’attends beaucoup des vacances :-), alors c’est un livre que j’aimerais bien lire.

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    1. Moi aussi, je craignais… à part des phrases un peu longues, mais qui restent tout à fait lisibles, le style n’a vraiment rien d’inaccessible. J’espère que les vacances vont t’apporter ce que tu souhaites !

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  2. J’ai apprécié également ce roman, riche en réflexions et en rebondissements, la lecture effectivement est très fluide. C’était aussi ma première découverte de cette auteure.

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  3. Répéré en librairie, ce roman et son intrigue me tentent beaucoup. Mais, j’ai lu des extraits et je sais que ce n’est pas pour moi – surtout qu’il est long. Dommage.

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  4. Je viens justement de regarder une vidéo sur ce livre et la personne expliquait ce roman mais n’était pas très claire (ou je n’ai pas compris tout simplement). Ton billet me permet de mettre un peu d’ordre là-dedans. Je vais regarder pour l’emprunter en ebook.

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  5. Bonjour Kathel, je l’ai terminé et j’ai aimé cette lecture. Moins ardue et dense que Ce qui reste de nos vies. Quand on lit la 4ème de couverture, je m’attendais à une histoire d’amants et c’est surtout une histoire de famille à un moment donné. Il faut qu’Iris choisisse entre son amant et sa famille. J’ai trouvé la lecture aisée. Bonne journée.

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