Stuart Nadler, Les inséparables

inseparablesPendant une très courte période, Harold et Henrietta connurent simultanément le succès. Contrairement à elle, sa notoriété à lui fut locale, éphémère et le plus souvent indolore.
Si je vous dis trois portraits de femmes sur trois générations, vous allez me rétorquer que cela semble un brin classique et déjà-lu. Pourtant, Les inséparables possède des agréments qui font qu’il serait dommage de s’en passer.
Voici d’abord Henrietta, maintenant grand-mère, autrefois connue pour avoir écrit un livre sur le sexe, livre qui a été beaucoup décrié, notamment par les féministes, et dont elle aimerait ne plus entendre parler. Malheureusement, elle aurait bien besoin de l’argent que son éditeur lui propose pour une réédition… Ensuite, sa fille Oona, chirurgienne de renom, en pleine crise conjugale, revient vivre chez sa mère. Quant à Lydia, la petite-fille de quinze ans, elle affronte des moments pénibles lorsqu’une photo d’elle nue circule dans le lycée huppé où elle est pensionnaire.

Lydia rencontra d’abord un spécialiste du Net. Elle ignorait que ce genre de personne existait sur le campus. C’était un jeune homme, vingt-deux ans peut-être, qui portait des lunettes sans monture. Comprenait-elle qu’avec le temps l’idée qu’elle se faisait de son intimité, et particulièrement de son intimité corporelle, allait changer ?
La relation au corps est au centre du roman, plus encore que les relations familiales, et la manière dont tout tourne autour de ce sujet accroit l’intérêt pour les trois femmes, sans oublier les personnages masculins, tout de même un peu en retrait. La relation à l’argent, le statut social ont leur importance aussi, surtout pour Henrietta qui en est à essayer de trouver parmi les possessions familiales celles qui pourraient se monnayer.


Henrietta n’avait jamais plus rien écrit. Il n’y avait que ce roman. Elle avait rangé les critiques de l’époque dans un carton, entreposant l’étendue de son malheur avec d’autres souvenirs qui l’avaient également couverte de honte : les relevés de ses découverts, l’emballage impossible à ouvrir du diaphragme que sa mère lui avait commandé avant son premier semestre à Barnard College, ses pitoyables tentatives pour peindre des paysages.
La troisième raison de lire ce roman est le ton employé par l’auteur, qui manie allègrement l’humour et la dérision, sans se départir d’une complicité certaine pour ses personnages. On rit jaune avec eux plutôt que de rire d’eux. Toutes et tous sont attachants à leur manière, et quand les situations dérapent, ce qui arrive assez souvent, si cela prête à sourire, c’est aussi un moyen de réfléchir à ses propres relations au corps, au couple, à l’argent… Rien que dans le premier chapitre, j’avais déjà une belle moisson de citations, et au cours des quelques 400 pages, malgré quelques petites longueurs, j’ai eu bien des occasions d’apprécier l’écriture de cet auteur que je lisais pour la première fois.

Les inséparables, de Stuart Nadler (The inseparables, 2016) Albin Michel (mai 2017) traduction de Hélène Fournier, 403 pages

L’avis d’Albertine

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28 commentaires sur « Stuart Nadler, Les inséparables »

  1. Ce billet donne l’impression d’avoir déjà lu des romans un peu du même genre
    Il faut espérer que l’écriture apporte une note d’originalité.

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  2. Je l’ai lu, billet à venir un jour, mais je reste un peu dubitative (des longueurs?), je n’arrive pas à mettre la main sur ce qui m’empêche d’être plus enthousiaste

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    1. Je ne suis pas enthousiaste jusqu’au coup de coeur mais j’ai passé un bon moment, dans une période où pas mal de livres me tombent des mains… (et je n’en parle pas, parce que je ne vais pas assez loin entre leurs pages !)

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    1. Côté lecture, j’arrive à trouver des livres qui ne me tombent pas des mains (j’ai du choix !) mais je ne parviens pas à rédiger des avis… celui-ci était prêt depuis quinze jours.

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    1. Mais oui, où ai-je lu ton avis ? Sur Babelio ? Je ne savais pas à quoi m’attendre, j’ai été tout de suite happée par le roman et les personnages féminins bien campés… à part quelques petites longueurs.

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  3. J’avais bien aimé « Un été à Bluepoint » mais j’ai lu ici ou là un côté limite trop « érotique » pour ce roman.
    Qu’en penses-tu ?

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    1. Il n’y a rien qui m’ait choqué dans ce roman… l’auteur parle de sexe de manière assez décomplexée, mais cela s’inscrit dans le récit… non, je ne vois pas trop ce qui a pu étonner « ici ou là ».

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