John Lawton, Black-out

blackout

Londres, 1944. Sous les raids aériens qui continuent de faire souffrir une ville déjà exsangue, Frederick Troy, jeune policier qui a préféré rester à Londres que s’engager, s’intéresse à un bras retrouvé par des gamins jouant dans les décombres. Bizarrement, il ne s’agit pas d’une victime de bombardement, et le jeune détective de Scotland Yard fait le lien avec plusieurs disparitions de scientifiques réfugiés. S’ensuit une patiente, mais dangereuse recherche, agrémentée de rencontres pas dénuées d’intérêt pour le jeune homme.

J’ai choisi Black-out pour l’opération Babélio/prix du Polar SNCF, et d’être à Londres sous les bombes allemandes m’a fait réaliser la capacité de résilience des peuples. On s’immerge dans l’atmosphère de la ville martyrisée, et l’effet est saisissant de voir, même si je le savais déjà, comment les londoniens continuent à vivre, bien que la ville soit bombardée toutes les nuits, bien qu’ils manquent de tout. C’est plutôt rassurant, finalement, cette leçon venue du passé.

Quant à l’intrigue, elle est passionnante à souhait, compliquée sans être embrouillée, détaillée sans longueurs. L’auteur fait preuve de finesse lorsqu’il décrit les relations entre différents policiers, car plus que des oppositions de caractères, ce sont les écarts d’âge ou de classe sociale qui transparaissent. Fred Troy est un policier atypique, jeune célibataire d’origine russe et bourgeoise, cultivé, et surtout doté d’une obstination remarquable (ce qui est évidemment préférable pour un policier de roman, sous peine de voir celui-ci se terminer au bout de 65 pages).

Le roman dans son ensemble sonne très anglais, avec une certaine rigueur, un goût du détail juste, qui n’empêchent pas l’humour d’affleurer souvent, et pas toujours lorsqu’on l’attend. Je crois qu’il s’agit du premier et seul roman de l’auteur traduit en français, mais je retrouverais bien volontiers ce détective si la suite vient à paraître.

Extrait : Il alluma une grosse lampe torche chromée et s’aventura le premier dans l’escalier. Une forte odeur d’acétylène vint frapper les narines de Troy, accentuant son impression de descendre dans le premier cercle de l’enfer. L’enfer, normalement, ça doit puer le rôti. Un agent en uniforme, à genoux, réglait le débit d’eau d’une lampe à acétylène. Une demie-douzaine d’entre elles étaient arrangées en demi cercle sur la terre battue, leur lueur bleuâtre vacillant dans les courants d’air. Les éboulis de plafond qui jonchaient le sol projetaient sur les murs des ombres immenses, irrégulières et mouvantes.

L’auteur : John Lawton est l’auteur de sept polars mettant en scène l’inspecteur Troy, de deux romans indépendants et un ouvrage d’histoire. IL a été éditeur, a collaboré avec Harold Pinter et Gore Vidal, et a supervisé les publications de Wells, Conrad et D.H Lawrence. Il passe maintenant la plupart de son temps à écrire dans les collines du Derbyshire.
474 pages.
Éditeur : 10/18 (2015)
Sorti en VO en 1995
Traduction : Anne-Marie Carrière

A noter, je le signale gentiment, au moins deux coquilles (pages 92 et 215), qui mériteraient d’être corrigées…

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23 commentaires sur « John Lawton, Black-out »

    1. C’est son premier roman traduit en français si je ne me trompe pas, et il est sorti directement en poche, ce qui arrive, et en signifie pas qu’il soit de moins bonne facture…

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  1. repéré il y a quelques temps et complètement oublié, mais grâce à toi, il revient sur le devant de la scène (des priorités prioritaires 😉 )

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