Anton DiSclafani, Le pensionnat des jeunes filles sages

pensionnatdesjeunesL’auteur : Anton DiSclafani a grandi dans le nord de la Floride, où elle a participé à des compétitions équestres à l’échelle nationale. Elle est diplômée de l’Université de Washington, où elle enseigne actuellement l’écriture créative. The Yonahlossee Riding Camp for Girls paru en 2013, est son premier roman. Elle vit à Saint-Louis.
523 pages
Editeur : Livre de Poche (2014)
Traduction : Christine Barbaste
Titre original : The Yonahlossee Riding Camp for Girls

Début des années 30. Un père accompagne sa fille de quinze ans, Thea, de Floride en Caroline du Nord, pour un camp d’été où celle-ci se rend à contre-coeur. Mais il ne s’agit que de quelques semaines, et ce camp pour jeunes filles de familles aisées lui permettra de faire du cheval, une de ses passions. Cependant, elle ne s’adapte pas trop mal à cette vie au milieu de filles de son âge, elle qui ne fréquentait que sa famille proche, frère jumeau, parents, cousin… et après quelques temps, elle se rend compte que ses parents comptent la laisser pour une période bien plus longue et ne souhaitent pas la voir revenir. Le lecteur comprend petit à petit les événements qui les ont poussés à cette extrémité.
Ce roman constitue une véritable plongée dans les aspirations, les désirs et les soucis d’une jeune fille de quinze ans en 1930 par une jeune auteure du vingt-et-unième siècle (oui, Anton n’est pas un homme !) et je dois dire que c’est assez bien fait et que je ne m’y suis pas, comme je le craignais au début, le moins du monde ennuyée. La construction du roman, habile et assez typiquement américaine, pour peu qu’on ait lu un certain nombre de romans d’outre-Atlantique, permet à chaque retour en arrière, de reconstituer les mois qui ont précédé la mise à l’écart de Thea. Dans le même temps, celle-ci se fait sa place à Yonahlossee, notamment parmi les meilleurs cavalières, et aussi parmi les autres filles, et les membres du personnel.
L’agencement et l’emploi du temps de l’école, les activités pour jeunes filles promises à un avenir brillant, l’autorité du directeur et de sa femme, autant que sa vie antérieure, la plantation en Floride, les relations familiales tendues, la Dépression qui frappe, tout est vu par les yeux de Thea, et j’ai été épatée par l’immersion particulièrement réussie. A aucun moment, je n’ai trouvé ses pensées ou réactions inadaptées à celles d’une jeune fille de cette époque. Thea est plutôt délurée, et quelques scènes assez osées pourraient faire figurer ce roman dans la rubrique « Le premier mardi, c’est permis » de Stephie ! Mais il ne se résume pas à cela, et tient bien la route, par un bon équilibre entre initiation, roman historique, presque « roman de campus » et drame familial (mais pas de secret de famille comme on en trouve à toutes les sauces). Et j’oubliais l’amour touchant et sincère de Thea pour les chevaux, qu’elle tient sans doute de l’auteur qui l’a créée…
Une découverte intéressante, malgré plus de 500 pages, et une auteure à suivre !

Extraits : Mon frère et moi sommes nés au début de l’hiver, pendant une tempête ; il neigeait, les oiseaux tombaient du ciel, morts, saisis par ce froid inattendu, et dans le jardin de ma mère toutes les plates s’étaient recroquevillées et avaient bruni. Parce que ma mère portait très bas, mes parents s’attendaient à un garçon, de belle taille. Ce fut donc moi la surprise, pas Sam. J’étais l’enfant que personne n’attendait.
Il n’y avait aucun antécédent de jumeaux dans notre famille. Et celle-ci accueillit notre arrivée avec circonspection, surtout la mienne : soit j’avais sapé les forces de Sam à mon profit, soit Sam m’avait affaiblie. J’étais, au choix, une fille égoïste ou inutile. Mon père tenta de dissiper ces idées reçue en expliquant qu’il n’y avait rien pour les étayer. Mais même lui était inquiet – un garçon et une fille qui naissaient en même temps, c’était contraire à l’ordre des choses.


Car nous finirions toutes par nous marier – pas avant nos dix-huit ans, fallait-il espérer, mais tout de même avant de fêter nos vingt-et-un ans. Je crois toutefois qu’aucune d’entre nous ne liait mariage et passion. nous avions eu l’exemple de nos parents, de nos tantes et oncles, de nos sœurs avec leur mari. Nous n’étions pas idiotes. Nous comprenions que le désir était une chose dangereuse, à manipuler avec précaution – comme une mère le fait d’un flacon de parfum ancien, précieux, qu’elle transmettra à son aînée le jour de ses seize ans.
plldp

Les avis de Laurie, jurée, ou de Val bouquine

44 commentaires sur « Anton DiSclafani, Le pensionnat des jeunes filles sages »

  1. Là j’avoue que je freine des quatre fers malgré ton enthousiasme. Déjà c’est un pavé et puis le coté « roman de campus » et roman d’intiation, bof, bof…

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  2. Je viens de finir d’écrire ma chronique, je la relis demain et je la publierai jeudi. Du coup je viens te lire et je constate que nous avons le même avis et que nous avons aussi pensé au rdv de Stéphie. J’ai vraiment lu très rapidement ce livre, une jolie découverte, un petit bémol sur la fin pour moi.

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