Russell Banks, Un membre permanent de la famille

unmembrepermanentL’auteur : Ecrivain américain né en 1940 dans le Massachusetts, Russell Banks a passé son enfance dans le New Hampshire dans un milieu extrêmement modeste. Il a écrit des romans, des nouvelles et de la poésie. Son œuvre a été traduite en vingt langues. Il enseigne actuellement la littérature contemporaine à Princeton. Russell Banks est très actif politiquement, et il est aujourd’hui le président d’un organisme qui établit aux États-Unis des lieux d’asile pour des écrivains menacés ou en exil.
240 pages
Editeur : Actes Sud (janvier 2015)
Traduction : Pierre Furlan
Titre original : A permanent member of the family

J’ai retrouvé dans ces nouvelles l’auteur que j’ai tant aimé dans De beaux lendemains, et heureusement pas celui de La réserve qui m’avait déçue. Dans ces textes, parus d’abord dans différents magazines, dont un dans Télérama, Russell Banks ausculte l’Amérique des laissés-pour-compte, des déshérités, des familles éclatées, des pères désespérés, des mères déprimées, des enfants perturbés… Mais non, ne fuyez pas, c’est écrit avec tellement de brio, et en même temps, tellement d’humanité et d’espoir, que ce n’est pas aussi plombant qu’on pourrait le croire.
Un vieil homme tente de joindre les deux bouts en braquant des banques, un chien maintient le lien ténu entre les membres d’une famille éclatée, un homme a du mal à accepter la nouvelle vie de son ex-femme, le récipiendaire d’une transplantation cardiaque fait une rencontre, une veuve toute fraîche déploie ses ailes, un artiste partage avec ses amis l’annonce d’un prix prestigieux, une femme rassemble ses économies pour acheter une voiture… voici quelques résumés sommaires, et si vous croyez savoir où cela peut vous mener, renoncez à cette idée, et laissez vous prendre par la virtuosité de Russell Banks.
L’auteur reprend dans plusieurs de ses textes l’idée, qui semble très répandue aux Etats-Unis, qu’il est possible de changer de vie en déménageant, ou en changeant de métier ou de statut, qu’il suffit de le vouloir pour prendre un nouveau départ, dans le sens de changer presque totalement de personnalité par cette nouvelle vie. Cela semble plus fort que chez nous, l’impression de cette possibilité, et c’est assez surprenant, mais il ne faut pas attendre de ces nouvelles une réponse tranchée…
Rarement j’ai approché d’aussi près l’Amérique des petites villes, des retraités, des travailleurs pauvres, que dans ces nouvelles. Peut-être dans Zeitoun de Dave Eggers, ou dans Son of a gun de Justin St. Germain, mais ce ne sont pas des fictions.

Citations et extraits : Mais quand tu as été toute ta vie mariée à quelqu’un et que ce quelqu’un meurt, d’une certaine façon tu meurs aussi. Sauf si tu décides de renaître transformée en quelqu’un d’autre, en une personne encore indéfinie. Alors c’est presque comme si tu avais l’occasion de redevenir adolescente.

Pour Harold, cependant, Sheila représentait un passé qui n’arrêtait pas de saigner et de déteindre sur son présent, et qui, d’après ce qu’il pouvait prévoir, déteindrait également sur son avenir.

« Papa, t’es sûr que ça va, pour toi ? Je veux dire financièrement. Ça doit forcément être un peu dur, ces temps-ci. »
Connie ne répond pas, se contente d’une grimace où il baisse les lèvres de façon à signifier à son fils qu’il dit des choses ridicules, absurdes. C’est évident que ça va pour lui financièrement. C’est lui le père. C’est toujours lui, l’homme de la famille. Un ancien marine.

Les avis de Cathulu, Clara, Jostein (un grand merci !) 

44 commentaires sur « Russell Banks, Un membre permanent de la famille »

  1. Très belle chronique. C’est avec Le réserve que j’ai découvert et aimé l’auteur mais j’avaoue que si il m’avait enchanté au départ, j’ai lu mieux depuis chez cet auteur.
    Pour les amateurs, sachez que ce livre continue son voyage, il a déjà cinq ou six étapes programmées, mais si vous n’êtes pas trop pressés, vous pouvez vous inscrire sur Libfly ou sur mon blog.

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  2. « L’auteur reprend dans plusieurs de ses textes l’idée, qui semble très répandue aux Etats-Unis, qu’il est possible de changer de vie en déménageant, ou en changeant de métier ou de statut, qu’il suffit de le vouloir pour prendre un nouveau départ »

    Je te cite car c’est exactement le point de départ d’un autre roman de Russell Banks, que je lis en ce moment et qui s’intitule « Continents à la dérive ». J’aime beaucoup cet auteur (à part « La réserve » qui m’avait aussi déçue) mais j’ai adoré « American Darling », et « Pourfendeur de nuages « ou encore « Lointain souvenir de la peau », qui étaient plus qu’intéressants. Un très bon auteur.

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  3. J’ai aimé tout ce que j’ai lu de Russell Banks jusqu’ici (même si je dois avouer que suite aux mauvais échos que j’en ai eu, La Réserve moisit dans ma PAL depuis sa sortie). Le plus pour moi, c’est que ce sont les nouvelles, genre que j’apprécie beaucoup. Je ne devrais donc pas tarder à m’y plonger avec délices…

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  4. Des nouvelles de qualité, ce serait l’occasion, enfin, d’apprécier cet auteur. A chaque fois que je me suis lancé dans un de ses romans (Trailerpark, Le livre de la Jamaïque, Sous le règne de Bone), j’ai abandonné en cours de route. Il y a vraiment un truc que je ne m’explique pas entre lui et moi 😉

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  5. Vu chez Cathulu et Clara, oui c’est tentant !! Monsieur Antigone qui a vécu 6 mois aux Etats Unis m’a toujours dit que là bas effectivement le sentiment de pouvoir changer de vie est très fort et la possibilité réelle, mais avec tous les risques que cela comporte j’imagine.

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  6. Ah !! comme toi j’avais été déçue (très même) par « la réserve » mais j’avais aimé le suivant « lointain souvenir de la peau ». J’ai hâte de lire celui-ci.

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