Joseph O’Connor, Les âmes égarées

amesegareesL’auteur : Joseph O’Connor est un écrivain irlandais, né en 1963 à Dublin. Il est considéré comme l’un des auteurs qui a redonné un second souffle à la littérature romanesque en Irlande. Il a fait ses études à Dublin puis à Oxford, pour est ensuite journaliste pour The Esquire et l’Irish tribune. Il se consacre à l’écriture à partir de 1989. Il est le frère aîné de la chanteuse Sinead O’Connor. Ses romans ont été traduits en français : Le dernier des Iroquois, Desperados, A l’irlandaise, Inishowen, L’Etoile des Mers, Redemption Falls et Muse. Il a écrit aussi des pièces de théâtre, des essais, des scénarios.
291 pages
Editeur : Phébus (mai 2014)
Traduction : Carine Chichereau
Titre original : Where have you been ?

Il faut vraiment se sentir en pleine forme psychique et mentale pour lire certaines de ces nouvelles (je pense à Mort d’un serviteur de l’état). Aucune des trois premières nouvelles n’est joyeuse, et pourtant il semble qu’on en sorte de plus en plus persuadé qu’il faut profiter de la vie tant que c’est possible. Enfin, moi, j’y ai ressenti un certain goût pour la vie sous des dehors sombres. Familles décomposées, relations amicales, de couple ou familiales compliquées, mensonges, deuils et chagrins rythment les pages et pourtant une infime parcelle d’espoir reste toujours, quelques moments sont à sauver au milieu d’une débâcle générale.

Ces nouvelles pour la plupart ancrées dans le monde contemporain, évoquent souvent l’histoire de l’Irlande, dans la mesure où elle atteint l’intime, où elle touche l’individu. Un seul texte est vraiment historique, le très émouvant Orchard street, dont j’imagine qu’il a été écrit à la suite d’une visite du « Tenement museum », ou à destination de ce musée de New York. La nouvelle est autour de la mort d’un enfant dans un de ces appartements sombres et tristes où s’entassaient les immigrés de toutes origines, entre autres les irlandais. C’est la seule nouvelle aussi à s’éloigner de la région de Dublin, ou, juste au sud de Dublin, de la petite ville de Dun Laoghaire, lieux de prédilections de Joseph O’Connor. Le dernier texte est le plus long, une novella de 90 pages que je craignais de trouver un peu longuette par rapport aux autres et qui m’a touchée en plein cœur, à la toute fin…

Construites comme je les aime, ces nouvelles ne se dévoilent pas tout de suite, laissent l’histoire s’installer sur plusieurs pages, les personnages dialoguer et se découvrir, pour se finir doucement quand tout a été dit. Comme dans le précédent recueil de l’auteur, Les bons chrétiens, les personnages masculins prennent souvent la première place, et semblent avoir plus d’épaisseur que leurs compagnes, quoique cela soit un peu moins marqué cette fois-ci, il y a de beaux portraits de femmes aussi. En tout cas, j’ai trouvé cette sélection de nouvelles encore meilleure, à lire et à relire !

Extrait : Tout était calme. C’était un matin clair et glacé. En y repensant tandis qu’il traverse Dublin en ce début d’été, il ne croit pas avoir jamais vu de ciel aussi étoilé. Non, pas depuis. On aurait dit qu’on pouvait toucher les astres, les faire bouger dans les ténèbres. Il y avait quelque chose de surréaliste dans cette beauté, ce calme. Il avait arpenté le pont un moment. Des gens étaient regroupés ici et là. En tournant à l’arrière du navire, il avait croisé un vieux couple partageant une flasque de thé tout en écoutant de la musique classique à la radio. Il avait un jour essayé de raconter à un ami l’étrange beauté de cette scène : en pleine mer, dans le froid et l’obscurité, avec la présence de la musique à la radio. Il demeura un moment près du vieux couple. Il fumait, ce que Ciara n’appréciait guère. Ce qui arriva ensuite, jamais il ne l’oublia.

Les avis de Eeguab et Maeve.

37 commentaires sur « Joseph O’Connor, Les âmes égarées »

  1. De toute façon, la littérature est majoritairement sombre, alors, autant la choisir bonne. J’ai bien envie de découvrir cet auteur.

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  2. Je l’ai emprunté à la bibli mais je manque de temps, heureusement on peut prolonger le prêt ! (parce que tu me donnes encore plus envie, là ! J’avais adoré Inishowen.)

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  3. J’ai beaucoup aimé certains romans de cet auteur, dont « A l’irlandaise » et « L’étoile des mers » et « Muse », j’ai bloqué sur d’autres titres dont « Inishowen ». Des nouvelles me tentent donc bien ! En Irlandaises super sombres et super belles, il y a aussi « A travers les Champs bleus » de Claire Keegan, un régal !

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    1. Nous n’avons pas vraiment les mêmes goûts en guise de littérature irlandaise. J’ai bloqué sur Muse et adoré Inishowen. Quant à Claire Keegan, après avoir aimé L’antarctique et Les trois lumières, j’ai été un peu déçue par A travers les champs bleus…

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  4. ça me dit bien ces nouvelles irlandaises! Bon, je n’ai pas bcp de chance avec l’Irlande, le style Claire Keegan ne prend pas trop avec moi, mais d’autant plus motivant de découvrir un autre auteur de ce pays!

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  5. Je n’ai pas eu le sentiment qu’il fallait avoir le moral pour lire ce recueil mais j’avoue que je n’ai pas souvenir avoir jamais lu de livre d’un écrivain irlandais qui soit franchement comique donc peut-être que j’associe spontanément « littérature irlandaise » et « ça va pas être marrant » (ce qui ne me dérange pas).
    Orchard Street est effectivement un superbe texte. Quant à la novella je l’ai trouvée plus que longuette…
    Mon article est planifié pour demain donc je ne vais pas y répéter tout ce qui y figure mais, globalement, nos avis se rejoignent et pour moi ce fut une excellente surprise car je n’avais lu que « Inishowen » il y a fort longtemps et ne l’avais pas aimé.

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    1. C’est sûr que la littérature irlandaise est majoritairement sombre. Roddy Doyle peut parfois être drôle, avec un rire plutôt grinçant. « Inishowen », apparemment ne marche pas avec tout le monde, je me souviens avoir adoré, mais parfois je me demande si certains livres que j’ai aimés me plairaient autant après toutes les lectures qui sont passées entre temps… Je relis fort peu…

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  6. Comme ce sont des nouvelles, je passe mais j’ai lu un roman de cet auteur et j’en garde le souvenir d’une très belle plume.

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