Clemens J. Setz, L’amour au temps de l’enfant de Mahlstadt

amourautempsL’auteur : Né en 1982, Clemens Jonathan Setz a étudié la littérature et les mathématiques, selon lui moins ennuyeuses. Dès son deuxième roman, il fut nominé pour le Deutschen Buchpreis et obtint le prestigieux prix Ingeborg-Bachmann. Il est par ailleurs traducteur et vit à Graz.
270 pages
Editeur : Jacqueline Chambon (janvier 2013)
Traduction : Claire Stavaux
Titre original : Die Liebe zur Zeit Mahlstädter Kindes

Les nouvelles de ce recueil sont l’oeuvre d’un jeune auteur autrichien. De longueurs variables, elles ont en commun des tranches de vie quotidienne où s’invitent l’étrange, le bizarre, voire le glauque. Je ne savais pas trop au début de la lecture si l’auteur avait choisi le domaine du fantastique ou celui de la folie. Puis différents symptômes de maladies mentales semblent dominer, de la paranoïa au sadisme, de l’hypocondrie à l’agoraphobie, tant et si bien que le lecteur (enfin, moi !) finit par s’en trouver plutôt nauséeux… Dans ces histoires, les sensations et sentiments les plus communs finissent toujours par être altérés, et des séquences dont il n’est pas facile de savoir si elles sont rêvées ou réelles ajoutent au sentiment d’étrangeté. Les plus brèves des nouvelles, et parmi elles, celles qui m’ont laissée le plus perplexe, étaient plutôt réjouissantes, mais l’ensemble m’a laissé un goût amer qui m’empêche de les recommander.
Dans le même style, j’avais largement préféré les nouvelles d’une jeune auteur et cinéaste américaine, Miranda July, Un bref instant de romantisme qui laissaient apparaître plus de tendresse pour les personnages.
J’ai pensé aussi en cours de lecture à Yôko Ogawa (Les lectures des otages ou La mer) ou Haruki Murakami (Saules aveugles, femmes endormies), mais sans jamais être autant séduite que par ces deux auteurs japonais. C’est toutefois parmi leurs lecteurs que se trouveront sans doute ceux qui aimeront les nouvelles de Clemens J. Setz.

Extrait : Il y en avait des myriades, elles étaient innombrables et omniprésentes, ces zones grises abandonnées à la tristesse, la folie et la solitude, et logées dans les objets, les bâtiments et les situations : les garages grands ouverts avec leur immuable tache d’huile au sol, les poubelles qui débordent, les chiens à trois pattes, ou pire, les arrêts de bus où l’on est comme enchaîné à l’air libre ; puis d’autres choses, comme les couverts tordus, les moufles aux bords sales, les grains de sablage des routes en hiver, qui flottent dans les empreintes de pas laissées sur le sol de la cuisine, les cabines téléphoniques carbonisées, les buissons à l’odeur d’urine, où viennent se nicher pourtant des centaines de moineaux, les habits d’été aux couleurs qui s’estompent dans la lumière déclinante d’une cage d’escalier, avec ses petits balcons en forme de bénitier plongés dans la pénombre entre deux étages, sans aucune indication de leur utilité ; toute cette effroyable mélancolie et désolation d’un quai de gare, le va-et-vient du regard, à gauche : des rails à perte de vue, puis à droite : même spectacle, et la vaine tentative de s’agripper aux plis de la jupe maternelle, face à cette infinité sans issue, qu’on retrouvera sous une forme plus anodine le lendemain à l’école, dans l’échelle infinie des nombres.

 

26 commentaires sur « Clemens J. Setz, L’amour au temps de l’enfant de Mahlstadt »

    1. Tu as raison, il est autrichien. C’est vraiment très torturé, et j’ai du mal à imaginer si l’auteur ressent un besoin vital d’écrire de telles choses ou s’il le fait pour vendre… et j’avoue que ce genre d’interrogation n’aide pas à adhérer à ses écrits !

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    1. Comme me l’a fait remarquer Ys, il est autrichien… Bah, je laisse cette catégorie tout de même. Certaines nouvelles ne m’ont pas plu, mais d’autres sont intrigantes et moins choquantes.

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    1. Je n’arrive pas à te le recommander, même si je sais que tu aimes les nouvelles et que quelques-unes te plairaient peut-être…
      (HS la fonction modifier pour les commentaires est parfois utile… pour une petite lettre en plus mais il n’y a que moi qui y ai accès)

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