Richard Yates, Un été à Cold Spring

L’auteur : Richard Yates (1926-1992) est l’auteur de La fenêtre panoramique (1962, adapté au cinéma sous le titre Les noces rebelles par Sam Mendes), Onze histoires de solitude (nouvelles, 1963), Easter Parade (1976), Un été à Cold Spring (1986) ainsi que de quatre romans et un recueil de nouvelles pas encore traduits en français. Son œuvre a marqué toute une génération d’écrivains, parmi lesquels André Dubus, Raymond Carver ou Richard Ford.
205 pages
Editeur :
Robert Laffont (2011)
Traduction : Aline Azoulay-Pacvon
Titre original : Cold Spring Harbour (1996)

Evan Shepard a dix-neuf ans lorsqu’il se marie avec une camarade de lycée, tombée trop rapidement enceinte. Il est embauché dans une usine de machines-outils de Long Island où ils résident tous deux et peut ainsi subvenir aux besoins de sa petite famille. Evan prit l’habitude de rouler sans but, le soir, et de ruminer dans le noir, le visage grave. C’était vraiment bien de vivre avec une jolie fille folle de vous, aucun doute là-dessus. Mais cela donnait aussi à réfléchir. Etait-ce là tout ce qu’on pouvait attendre de la vie ? Il frappait le volant, encore et encore, n’arrivant pas à croire que son chemin était si bien tracé et qu’il n’y aurait pas moyen de le faire dévier alors qu’il n’avait pas encore dix-neuf ans.
Leur vie commune se solde rapidement par une séparation, et Evan caresse un moment l’idée de reprendre des études. Une coïncidence lui fait rencontrer, quelques années plus tard Rachel qui vit à New York. Bien qu’un peu oie blanche et nantie d’une mère encombrante, Rachel correspond à ce qu’Evan recherche :
Evan étudia Rachel de la tête aux pieds tandis qu’elle échangeait des politesses avec son père. Il aima sa peau, ses cheveux châtains et ses grands yeux noisette. Il ne voyait rien de « provocant » chez elle, mais elle était singulière : maigrichonne et douce, avec ce regard magnifique des êtres qui s’éveillent à la vie. Il se mit à peser les différentes implications des mots « tendre », « fraîche », « périssable » ; cette fille était de celles qu’on pouvait chérir et protéger. […] Et si quelqu’un réussissait à l’éloigner de ce trou pour l’exposer aux rayons fortifiants du soleil et lui faire prendre des forces, s’il réussissait à la maintenir au loin assez longtemps, elle pourrait facilement se transformer en une femme digne qu’il verse son sang pour elle, digne qu’il lui sacrifie sa vie, qu’il lui sacrifie tout. En tout cas, cela valait la peine d’essayer.
Rachel et Evan se rapprochent, leurs familles font connaissance, et comme cela était souvent le cas à l’époque, des noces finissent par être décidées pour mettre fin à une période de frustration sexuelle d’avant-mariage. L’installation à Cold Spring, petite bourgade de Long Island suivra en cet été 1942…
Après Easter Parade, je retrouve la plume de Richard Yates, qui n’a pas son pareil pour mettre en scène des personnages qui assistent impuissants à leur vie, dans laquelle ils semblent englués. De la fin des années 30 jusqu’à la deuxième guerre mondiale, le lecteur s’immisce dans la vie de deux familles qui se trouvent liées par un mariage. Malheureusement pour le jeune couple, leurs parents respectifs sont loin de présenter des modèles fiables, ce n’est rien de le dire, pour la réussite d’une vie commune. Ce roman écrit d’une plume acérée ne cache rien des embarras, des complexes et de la morosité ambiante, et déroule des vies qu’on imagine en noir et blanc.
A découvrir pour qui aime ces atmosphères américaines d’il y a quelques décennies !

26 commentaires sur « Richard Yates, Un été à Cold Spring »

  1. J’ai aimé la fenêtre panoramique mais je n’ai rien lu d’autre, les histoires de couples je lis ça à petites doses car autrement ça m’ennuie un peu
    je prends note pour dans quelques temps

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    1. Le reste de la famille n’est pas négligé, ni le contexte historique, un peu plus discret cependant… Je ne me suis pas du tout ennuyée et pourtant, en ce moment, tout me tombe des mains, ou presque !

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  2. J’aime beaucoup cet auteur et cette ambiance des petites vies de couples dans l’Amérique de ces années-là et j’ai vraiment beaucoup aimé »La fenêtre panoramique ». Je lirais bien volontiers d’autres romans de lui encore si je les trouve facilement en Poche ou à la bibliothèque.

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    1. Ce doit être ce qui m’a incitée à voir le livre défiler comme un film en noir et blanc… avec voitures décapotables et foulards volant au vent. Mais la vie de ce jeune couple a du mal à se conformer à cette image idyllique.

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  3. C’est terrible ces auteurs morts qui ne cessent de publier… (ah, si les éditeurs français avaient eu un peu plus de flair, ils n’auraient pas attendu si longtemps avant de le traduire).
    Pour le moment, seul Fenêtre panoramique est dans ma PAL mais tous ses autres romans figurent en bonne place sur ma LAL…

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