Fabrice Humbert, Avant la chute

Rentrée littéraire 2012
L’auteur :
Professeur de lettres, Fabrice Humbert a déjà publié trois romans, Autoportraits en noir et blanc (Plon, 2001), Biographie d’un inconnu (Le Passage, 2008), retenu en sélection finale du prix Roger Nimier 2008 et dont la presse a salué la qualité littéraire, et L‘Origine de la violence (Le Passage, 2009), premier Prix Orange du Livre, unanimement reconnu par la critique et les lecteurs. Il a publié également La fortune de Sila en 2010.
288 pages
Editeur : Le passage (août 2012)

Le début au fin fond de la forêt colombienne est saisissant : un père de famille tente de survivre en cultivant bananes et maïs, jusqu’à ce que les cours des denrées s’effondrent et qu’on ne lui laisse d’autre choix que de cultiver des plants de coca, malheureusement pour peu de temps. Les évènements poussent ses deux filles adolescentes, Sonia et Norma, sur les routes pour essayer d’atteindre les Etats-Unis. Plus au nord, le sénateur Urribal personnage sombre et solitaire, parcourt son domaine, avant de s’envoler pour Mexico où il est membre d’un parti influent. Dans la banlieue parisienne, le jeune Naadir, de son regard d’élève précoce, observe les trafics qui gangrènent sa cité. Trois destins autour du trafic de drogue, trois parcours émouvants et prenants. Le milieu du livre comporte à peine quelques passages un peu longs sur l’économie parallèle, mais ils sont utiles à la compréhension de ce qui gangrène un pays comme le Mexique.
Sur un thème assez proche de La fortune de Sila, Fabrice Humbert montre une nouvelle fois son art de toucher le lecteur avec des mots si bien choisis et agencés qu’ils semblent couler de source. La construction alterne entre les trois personnages principaux, de manière régulière et sans ennui, puisque chacun d’eux provoque l’intérêt, même si Sonia et Norma m’ont émue bien davantage. Leur périple à travers l’Amérique centrale, où les candidats à une autre vie parcourent des centaines de kilomètres sur le toit d’un train, est de ceux qui restent en mémoire, et j’ai souhaité tout autant que les deux jeunes filles qu’elles parviennent à leur but.
Encore une belle lecture pour cette rentrée décidément foisonnante.

Extraits : Sur le terrain dégagé, ils avaient planté des bananiers et du maïs. Sur le sol humide et gras, balayé par les vents et les pluies, les plantes s’étaient levées. Elles avaient rapidement grandi et lorsque les pousses s’étaient épanouies, lorsque les formes s’étaient courbées, ils les avaient fixées avec une joie sourde, pleine d’attente. Et puis une fille était née. Ils l’avaient nommée Sonia.
La première récolte avait dépassé leurs espérances. Le maïs était lourd et jaune comme de l’or, et sa promesse était bien celle de ce métal : ils allaient enfin pouvoir vivre. La langue verte de leur petit terrain, parcelle de culture au milieu des montagnes, réjouissait leur regard. C’était leur joyau, leur trésor. Suspendant leurs produits à dos de mule, ils avaient vendu cette récolte au village d’Harmosa, à deux heures de marche. Le village, logé sur une crête à l’extrémité d’une route boueuse, semblait comme paralysé de langueur, à la mesure de ces contrées montagnardes à l’écart de la ville, mais ils avaient tout de même trouvé un acheteur régulier pour écouler leur production. 

Mais en cette soirée, Rivera était au sommet de sa puissance, juste au moment où tout va se renverser, lorsque le succès tourbillonne en éclats lumineux avant d’emporter dans la chute celui qu’il a élu. Tout lui souriait. Urribal, depuis, avait compris cela : c’est au moment où les êtres sont enveloppés de lumière qu’ils commencent à chuter. On croit qu’ils brillent alors qu’ils brûlent.

33 commentaires sur « Fabrice Humbert, Avant la chute »

  1. Oh, le beau blog!!!!!!! Il est superbe! Il faudrait un jour que je pense à faire de même!

    Je n’ai toujours pas lu cet auteur mais je ne désespère pas !

    PS : j’ai craqué pour la grande bleue de Nathalie Démoulin et ce par ta faute:)!

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  2. Il y a quelques auteurs français qui sortent nettement du lot en cette rentrée, dont lui a priori dont je n’ai pas vraiment apprécié L’origine de la violence.

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  3. Question qui n’a rien à voir : tu rapatries d’anciens billets? je suis parfois perdue, car ma cervelle de linotte ne me prévient pas toujours, pour certains romans je suis sûre d’avoir lu tes billets, pour d’autres je ne sais plus.

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    1. J’en ai rapatrié quelques-uns pour ne pas que ce blog ait l’air trop vide, mais le Humbert est nouveau ! Mais tu as raison, si dorénavant, j’en transfère, il faudra que je le précise !

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  4. J’ai aimé les deux romans précédents de Humbert, là je suis moins tentée car l’Amérique Centrale ce n’est pas ma tasse de thé A voir
    ouf j’ai trouvé pour les commentaires je devais être un peu aveugle !!

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  5. Fabrice Humbert est pour moi une des révélations de ces dernières années (avec Jérôme Ferrari) en littérature française. Je n’ai pas encore lu celui-ci mais ça ne devrait pas tarder.

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